Le crédit immobilier

Fiche pratique J 160


Souscrire un crédit n’est pas un acte anodin et encore moins lorsqu’il s’agit de financer un bien immobilier compte tenu des sommes en jeu et de la durée relativement importante du prêt.

 

C’est pourquoi le crédit immobilier fait l’objet d’une réglementation spécifique, laquelle établit un lien fort entre l’opération de financement (le contrat de crédit) et l’opération d’accession immobilière (le contrat de vente). Ainsi, si vous n’obtenez pas le crédit demandé pour financer votre projet, votre contrat d'achat ou de construction ne s'appliquera pas. Inversement, vous pouvez renoncer à votre crédit si l'opération immobi­lière n'aboutit pas.

 

Cette fiche fait le point sur ce que vous devez savoir en matière de crédit immobilier à trois moments bien distincts de votre projet de financement. 

 

 

1 - Avant de vous lancer dans la recherche de votre crédit

1.1 - Qu'entend-on par crédit immobilier ?

1.2 - A qui s'adresser pour obtenir un crédit immobilier ?

1.3 - Le point de départ : la signature du compromis de vente

1.4 - Une protection essentielle : la condition suspensive d'obtention des crédits

 

2 - De la recherche de votre crédit à la signature définitive du contrat

2.1 - Ce que toute publicité pour un prêt immobilier doit indiquer

2.2 - Les questions que vous devez vous poser pour bien choisir votre crédit

2.3 - La fiche d'information standardisée européenne

2.4 - L'évaluation de votre dossier et le devoir de mise en garde

2.5 - La proposition effective de l'organisme financier : l'offre de prêt

2.6 - Pas de délai de rétractation mais un délai de réflexion

 

3 - De la signature du contrat au remboursement complet de votre crédit

3.1 - L'interdépendance des différents contrats

3.2 - La domiciliation des revenus

3.3 - Les obligations spécifiques au prêt à taux variable

3.4 - La renégociation du prêt

3.5 - Le remboursement anticipé

3.6 - La suspension du contrat de crédit

3.7- En cas de difficultés pour rembourser votre crédit

 

1 - Avant de vous lancer dans la recherche de votre crédit

1.1 - Qu'entend-on par crédit immobilier ?

Au sens large, un crédit immobilier peut être défini comme un prêt d'argent visant à financer une opération immobilière.
Mais dans le cadre de cette fiche, nous nous intéresserons exclusivement aux crédits immobiliers pour lesquels la loi a prévu des dispositions spécifiques en vue de protéger le consommateur.
 

Ces dispositions sont codifiées sous les articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation. Elles concernent les prêts :

 

  • finançant l'achat de terrains destinés à la construction d'immeubles à usage d'habitation (ou à usage professionnel et d'habitation) ;
  • finançant la construction d'immeubles à usage d'habitation (ou à usage professionnel et d'habitation) ;
  • finançant l'acquisition (en propriété ou en jouissance) d'immeubles à usage d'habitation (ou à usage professionnel et d'habitation), y compris la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien ;
  • garantis par une hypothèque (ou tout autre sûreté comparable sur les biens immobiliers à usage d'habitation), quel que soit leur objet.

  Les prêts permettant l'achat de parts ou actions de sociétés (société civile immobilier ou SCI, société civile de placement immobilier ou SCPI) donnant vocation à l’attribution de logements en propriété ou en jouissance sont également concernés. De plus, les personnes morales de droit privé (associations, syndicat de copropriétaires...) peuvent bénéficier des mêmes droits que les consommateurs lorsque le crédit accordé n'est pas destiné à financer une activité professionnelle.

 

Parmi les crédits immobiliers couverts par le code de la consommation, on trouve le prêt bancaire classique mais également une multitude de produits répondant à des besoins spécifiques :

 

  • le prêt relais : c'est un financement de courte durée permettant d'acheter un nouveau logement avant d'avoir vendu son logement actuel ;
  • le prêt in fine : c'est un prêt où seuls les intérêts sont à payer régulièrement, le capital étant remboursé en une seule fois à la fin du prêt ;
  • le prêt épargne-logement (PEL) : voir les fiches de l'INC sur le plan épargne logement et le compte épargne logement ;
  • le prêt conventionné : prêt ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement ;
  • le prêt accession sociale (PAS) : prêt conventionné à taux avantageux et réservé aux ménages à revenus modestes ;
  • le prêt action logement (exemple 1% employeur) : prêt à taux avantageux réservé aux salariés d'entreprises privées de plus de 10 personnes et dont l'obtention est soumise à conditions ;
  • le prêt à taux zéro (PTZ) : voir la fiche INC sur le PTZ ;
  • l'éco-PTZ : voir la fiche INC sur l'éco-PTZ.

 

1.2 - A qui s'adresser pour obtenir un crédit immobilier ?

Les établissements de crédit et les sociétés de financement sont les principaux établissements susceptibles de financer votre projet immobilier. Il existe néanmoins d'autres acteurs comme les organismes collecteurs du 1% logement (Action logement) mais également les particuliers dans le cadre du financement participatif (ordonnance du 30 mai 2014).

 

Mais au-delà des prêteurs, il existe une autre catégorie d'intervenants pouvant être très utile. Il s'agit des intermédiaires de crédit (courtiers) dont le rôle est de rechercher à votre place le prêt le plus intéressant parmi les différentes banques avec qui ils sont en relation. Ils doivent être inscrits au registre d'immatriculation de l'ORIAS.

Le courtier agit pour votre compte et doit donc détenir un mandat de recherche de votre part. Ses honoraires sont incorporés dans le calcul du taux du prêt. Aucune commission (frais de recherche ou provision) ne peut être perçue avant l'acceptation de l'offre de prêt et le versement effectif des fonds. Toute publicité réalisée par l'intermédiaire doit indiquer l'établissement pour lequel il intervient.

 

À noter...  Depuis le 28 juillet 2013 (entrée en vigueur de la loi séparation et de régulation des activités bancaires), vous n'êtes plus autorisé à souscrire un prêt immobilier dans une devise étrangère et remboursable en euros, sauf si vous percevez principalement vos revenus ou détenez un patrimoine dans cette devise au moment de la signature du contrat de prêt (article L. 313-64 du code de la consommation).

 

1.3 - Le point de départ : le compromis de vente

Même s'il est toujours possible de contacter un organisme financier pour se faire une idée de la somme qui pourra vous être prêtée, les prêteurs ne vous feront une proposition claire et relativement affinée que lorsque vous aurez un projet immobilier précis.

Or, pour devenir propriétaire d’un bien immobilier, vous devrez au préalable signer un avant-contrat de vente avant la signature définitive devant le notaire, laquelle interviendra quelques semaines plus tard. Cette formalité s’explique par le fait qu’au moment de s’engager dans une acquisition immobilière, vous ne disposez pas de toutes les informations nécessaires sur le bien, ni sur les modalités précises de son financement.

 

Il existe plusieurs formes d’avant-contrat mais le plus utilisé est le compromis de vente (également appelé promesse synallagmatique de vente). Le compromis engage les deux parties : chacune peut contraindre l’autre à passer le contrat de vente devant notaire ou à exiger, en contrepartie de la rupture du compromis, le versement de dommages et intérêts. Lors de la signature du compromis, vous devrez verser au vendeur un dépôt de garantie (maximum 10 %) que ce dernier conservera si vous ne souhaitez finalement plus acquérir le bien.

En cas de signature d'un compromis, vous disposez d'un délai de rétractation de 10 jours (article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation).

 

1.4 - Une procédure essentielle : la condition suspensive d'obtention des crédits immobiliers

Le compromis de vente est conclu sous la condition suspensive de l'obten­tion du ou des crédits immobiliers nécessaires au financement de votre projet (article L. 313-41 du code de la consommation).

Il doit indiquer si le prix sera payé comptant ou à crédit. En l'absence d'indi­cation, vous bénéficiez automatiquement des dispositions de la loi.

 

Si vous payez comptant, vous devez l'indiquer dans le contrat, en ajoutant, de manière manuscrite, reconnaître avoir été informé que si vous sollicitez ultérieurement un prêt, vous ne pourrez plus demander l'application de la loi (article L. 313-42 du code de la consommation).

 

Si vous avez besoin de crédit(s) immobilier(s), vous devez préciser dans le compromis les conditions de ce financement : nombre de crédits, caractéristiques, taux d'intérêt maximum, mensualité, durée. Nous vous conseillons d’être le plus précis possible afin que vous puissiez faire jouer la condition suspensive quand bien même un financement serait trouvé mais qui ne correspond pas à vos attentes. Par exemple, vous n’avez pas forcément envie d’emprunter sur une période supérieure à vingt ans ou de souscrire un prêt à taux variable donc vous avez intérêt à mentionner dans le compromis que le financement se fera avec un crédit à taux fixe d'une durée maximale de 20 années.

 

Pour ne pas bloquer trop longtemps les transactions im­mobilières, le temps laissé à l'acheteur pour trouver ses prêts est limité à un mois minimum. Dans la pratique, cette durée est souvent fixée à 45 jours mais il est possible de négo­cier une période plus longue ou de demander un délai supplémen­taire à la fin du délai minimal légal.

 

A l'issue de ce délai, si vous n'avez pas obtenu une offre de prêt conforme aux caractéristiques prévues dans le compromis de vente, alors ce dernier sera caduc. Pour le justifier, il pourra vous être demandé, si le compromis le prévoit :

 

Toute somme que vous aurez versé d'avance dans le cadre du contrat de vente devra vous être remboursée intégralement et immédiatement sans qu'une indemnité ne puisse être retenue. A compter du quinzième jour suivant la demande de rem­boursement, la somme réclamée produit des intérêts au taux légal majoré de moitié.

 

  Pour éviter tout contentieux dans le remboursement des sommes dues, il est conseillé de consigner les sommes à verser entre les mains d'un tiers (établissement financier, notaire).

 

Sanction : la non-restitution par le vendeur des sommes versées d'avance est puni d'une amende de 300 000 €.

 

 

2 - De la recherche de votre crédit à la signature définitive du contrat

2.1 - Ce que toute publicité pour un prêt immobilier doit indiquer

Un message publicitaire réalisé pour un crédit immobilier doit indiquer, quel que soit son support : l'identité du prêteur ou de l'intermédiaire de crédit, la nature et l'objet du prêt proposé (articles L. 313-3 et suivants du code de la consommation). Si cette publicité comporte un taux d'intérêt ou des éléments chiffrés relatifs au coût du crédit, elle doit préciser, à l'aide d'un exemple représentatif (article R. 313-1 du code de la consommation) :

 

  • le taux débiteur et sa nature fixe, variable ou révisable ainsi que les informations relatives à tous les frais compris dans le coût total du crédit pour l'emprunteur ;
  • le montant total du crédit ;
  • le taux annuel effectif global du crédit (TAEG) ;
  • la durée du contrat de crédit ;
  • le montant total dû par l'emprunteur ;
  • le montant et le nombre des échéances ;
  • le cas échéant, un avertissement relatif aux éventuelles fluctuations du taux de change susceptibles de modifier le montant dû par l'emprunteur ;
  • le cas échéant, le fait que le contrat sera garanti par une hypothèque ou une autre sûreté comparable ou par un droit lié à un bien immobilier à usage d'habitation.

Toute publicité doit également mentionner que vous disposez d'un délai de réflexion de 10 jours, que la vente (du bien immobilier nécessitant le financement) est subordonnée à l'obtention du prêt et que, si celui-ci est refusé, le vendeur doit vous rembourser les sommes versées (article L. 313-3 du code de la consommation). 

Toutes les mentions obligatoires doivent être présentées de manière parfaitement lisible et compréhensible par le consommateur.

 

La publicité ne doit pas donner d'indications trompeuses, telles que comparer les mensualités de remboursement à des loyers, ou faire référence, pour le calcul des échéances, à des prestations sociales qui ne sont pas accordées pen­dant toute la durée du contrat (prestations familiales, allocation personnalisée au logement).

 

Est également interdite toute formulation susceptible de faire naître chez le consommateur de fausses attentes concernant la disponibilité ou le coût du crédit (article L. 313-5 du code de la consommation).

 

Les règles relatives à la publicité sont applicables également aux établissements situés hors de France, à partir du moment où la publicité est destinée au marché français et donc s'adresse aux résidents français.

 

Sanction : le non-respect de ces règles relatives à la publicité est puni d'une amende de 30 000  € (article L. 341-21 du code de la consommation).

 

Concernant les courtiers en crédits immobiliers, toute publicité pour le compte de l'intermédiaire doit comporter, de manière apparente, la mention suivante "aucun versement, de quelque nature que ce soit, ne peut être exigé d'un particulier, avant l'obtention d'un ou plusieurs prêts d'argent" (article L. 322-2 du code de la consommation).

 

2.2 - Les questions que vous devez vous poser pour bien choisir votre crédit

Combien rembourser chaque mois ?

C'est une question importante car le remboursement de votre crédit va grever durablement votre budget. Elle dépend de la durée de votre prêt : plus la durée est longue et plus votre mensualité sera faible... mais plus le coût de votre prêt sera au final élevé du fait des intérêts à payer.

 

La tentation est donc de réduire au maximum la durée mais attention à ne pas vous mettre inutilement dans le rouge. Pour cela, évaluez toutes vos charges mensuelles incompressibles, ajoutez-y une enveloppe consacrée à vos loisirs ou à une épargne de précaution et regardez ce que vous pourrez raisonnablement consacrer au remboursement d'un prêt immobilier.

 

En règle générale, l'organisme de crédit fait en sorte que votre échéance de crédit ne dépasse pas un tiers de vos revenus. Il engage d'ailleurs sa responsabilité s'il ne vous met pas en garde contre le risque d'une échéance de crédit trop élevée au regard de vos revenus et charges ou s'il vous accorde un crédit alors que vous êtes déjà trop endetté (voir l'évaluation de votre dossier et le devoir de mise garde).

 

Certains établissements proposent des échéances "modulables", à la hausse et/ou à la baisse, ce qui peut vous permettre d'ajuster en cours de crédit. Mais regardez bien les modalités de cette modulation : quand est-elle possible ? Quelle est la variation possible ? Combien cela coûte ?

 

Taux fixe ou taux variable (révisable) ?

Le prêt à taux fixe a l'avantage de vous permettre de connaître à l'avance l'échéancier précis de votre crédit (c'est-à-dire les dates d'échéances à payer et leur montant) ainsi que le coût total de votre crédit (si vous allez jusqu'à son terme).

 

Le prêt à taux révisable va voir son taux varier dans le temps en fonction de l'évolution d'un taux de référence de marché. Cela aura des conséquences sur le niveau de vos mensualités ou sur la durée de votre crédit (à la baisse si le taux descend, à la hausse si le taux monte). Ce type de prêt présente généralement un taux d'intérêt moins élevé que celui des prêts à taux fixe et il vous permet de profiter d'une éventuelle baisse des taux. Mais attention : il existe un risque que le taux monte est que votre crédit vous coûte plus cher au final. Pour pallier ce risque, il existe le plus souvent une limite à la hausse du taux (mais également à la baisse) : c'est ce qu'on appelle les prêts à taux capés.

 

En conclusion, les prêts à taux révisable peuvent constituer un choix judicieux d'un point de vue financier (au cas où le taux ne remonte pas, et surtout s'il baisse) mais il est risqué. La prudence milite donc plus pour le taux fixe, d'autant que si les taux baissent, rien ne vous empêche de renégocier votre crédit en cours de remboursement, moyennant certains frais.

 

La garantie du banquier : hypothèque ou cautionnement ?

L'organisme de crédit qui va financer votre projet aura besoin d'une garantie dans le cas où vous n'assuriez plus le paiement de vos échéances de crédit.

 

Il existe deux systèmes :

 

  • l'hypothèque conventionnelle et le privilège du prêteur de deniers (PPD) : ces deux modalités permettent à la banque d'intenter une procédure de saisie immobilière et d'être prioritairement bénéficiaire du produit de la vente du bien saisi. Leur mise en place nécessite un acte authentique fait devant notaire. Le PPD est moins onéreux que l'hypothèque mais il ne concerne que le financement d'un terrain et/ou d'un bien déjà construit (il ne peut donc être utilisé pour le financement de travaux ou d'une construction). En cas de remboursement total ou de revente du bien avant la fin du crédit, des frais de levée d'hypothèque seront à votre charge, ce qui constitue un inconvénient par rapport au cautionnement.
     
  • le cautionnement bancaire : il s'agit de faire appel à une société  qui s'engagera à payer à votre place la banque si vous n'assurez plus le remboursement de votre crédit. Elle cherchera alors avec vous une solution à l'amiable et, en cas d'échec, entamera les procédures pour saisir votre bien. Son prix est généralement inférieur à l'hypothèque conventionnelle mais supérieur à la PPD. Toutefois, une partie des frais engagés vous seront remboursés lorsque le prêt sera remboursé.  

    En conclusion, le cautionnement est plus économique que l'hypothèque sauf dans le cas où votre opération peut être garantie par un PPD (pas de travaux, pas de construction) et que vous ne comptez pas rembourser votre prêt avant le terme prévu (pas de frais de mainlevée).

Suis-je obligé de prendre l'assurance que me propose la banque ?

L'organisme qui vous fait crédit exige quasi-systématiquement que vous preniez une assurance couvrant les risques de décès, d'invalidité et d'incapacité de travail. Cette assurance constitue une garantie supplémentaire pour la banque puisqu'elle peut intervenir si vous êtes victime d'"un accident de la vie" afin que vous, ou votre famille, puissiez rembourser votre crédit. La prime d'assurance se paye chaque mois et vient donc s'ajouter à la mensualité de crédit. Son montant est soit fixe pendant toute la durée du crédit car correspondant à un pourcentage du capital emprunté ; soit en diminution constante si la prime correspond à un pourcentage du capital restant dû (lequel diminue chaque mois).

 

Lorsque vous avez un co-emprunteur (par exemple votre conjoint), la banque demandera au moins que vous preniez une assurance répartie sur les "2 têtes" en fonction des revenus respectifs de chacun. Par exemple : si vous gagnez 2250  €/mois et votre co-emprunteur 1500 €/mois, cela signifie que vous contribuez à 60 % du revenu global (2250/3750).  Dans ce cas, l'assurance sera répartie à 60 % sur vous et 40 % sur votre co-emprunteur. Cela signifie que si vous décédez, l'assurance ne remboursera le solde du crédit qu'à hauteur de 60 %, votre co-emprunteur devant continuez à rembourser à hauteur de ces revenus. Il est clair que l'idéal est de pouvoir assurer chaque tête à 100 % : en cas de pépin, la question du crédit est réglée par l'assureur dans sa totalité ; mais cela revient à doubler le coût de l'assurance. A vous de voir mais cela constitue un bon moyen de soulager financièrement vos proches en cas de coup dur.

 

L'établissement de crédit vous proposera sa "propre" assurance en complément du crédit immobilier, appelée "assurance groupe". Mais vous n'êtes pas tenu de la prendre et pouvez souscrire une assurance ailleurs, c'est ce qu'on appelle la "délégation d'assurance". Si cette assurance présente des garanties équivalentes à l'assurance groupe, alors la banque ne pourra refuser la délégation et ne pourra pas non plus majorer le taux d'intérêt du crédit qu'elle vous avait proposé. Pour pouvoir identifier ce que couvre et coûte précisément l'assurance groupe et éventuellement trouver une assurance alternative aux garanties équivalentes, l'organisme de crédit doit vous remettre une notice (article L. 313-29 du code de la consommation) ainsi qu'une fiche standardisée d'information (article L. 313-10 du code de la consommation). Par ailleurs, au-delà de ces deux exigences légales, votre établissement préteur doit, conformément à l’avis du CCSF du 13 janvier 2015, vous remettre une fiche personnalisée contenant les critères qui sont considérés d’après lui équivalent aux garanties proposées par le contrat d’assurance groupe distribué par ses soins.

 

> Pour plus d'information, consultez la fiche de l'INC sur l'assurance emprunteur.  

 

Comment comparer le prix d'un crédit ?

Le coût d'un crédit comprend plusieurs composantes : les frais de dossier (voire de courtage), les intérêts, les primes d'assurance, la mise en place de la garantie. Il n'est donc pas possible de comparer le prix d'un crédit en se basant uniquement sur le taux d'intérêt "conventionnel" qui est est le taux à partir duquel sont calculés les intérêts que vous devez à la banque chaque mois.

 

Exemple : si au 1er du mois, vous devez 150 000 € à la banque et que le taux conventionnel est de 4 % par an alors à la fin du mois, vous devrez payer à la banque 150 000 € x 4 % /12 mois, soit 500 € d'intérêts).

 

Pour bien comparer, il n'est pas non plus correct d'ajouter simplement l'ensemble des frais car certaines sommes sont à payer tout de suite (frais de dossier, garantie) alors que d'autres vont être payés dans le futur (échéances de crédit et primes d'assurances à venir). Or 1 € payé aujourd'hui a plus de valeur qu'1 € payé dans 10 ans et encore plus que dans 20 ans.

 

C'est pourquoi il est nécessaire d'utiliser le taux annuel effectif global (TAEG) qui permet à la fois d'intégrer l'ensemble des frais intervenant dans l'opération de crédit (article L. 313-1 du code de la consommation) et de prendre en compte les différentes dates de paiement. Ce taux n'est pas facilement calculable mais ce taux doit forcément apparaitre dans les publicités, dans la fiche d'information standardisée européenne ou dans les documents contractuels. N'hésitez pas à le demander lorsque vous en êtes au stade des simulations avec votre banquier. Plus le TAEG est bas, moins le prix du crédit est élevé.

 

Puis-je me faire conseiller ?

Le prêteur ou l'intermédiaire peut vous fournir un service de conseil en matière de contrats de crédit (articles L. 313-13 à 15 du code de la consommation).
Ce service consiste à vous faire des recommandations personnalisées, en fonction de vos besoins et de votre situation financière, et sur la base d'un nombre suffisamment important de contrats de crédit disponibles sur le marché. Il constitue une activité distincte de l'octroi de crédit et de l'activité d'intermédiation et peut faire l'objet d'une rémunération de votre part, et seulement de votre part (sinon le conseil ne serait plus considéré comme indépendant).

 

 

2.3 - La fiche d'information standardisée européenne

Le  prêteur ou l'intermédiaire de crédit doit vous communiquer, par écrit ou sur un autre support durable, sous la forme d'une fiche d'information standardisée européenne, les informations personnalisées vous permettant de comparer les différentes offres de crédit disponibles sur le marché, d'évaluer leurs implications et de se déterminer en toute connaissance de cause sur l'opportunité de conclure un contrat de crédit (article L. 313-7 du code de la consommation). Cette fiche d'information doit vous être remise gratuitement et au plus tard lors de l'émission de l'offre de prêt.
Les informations contenus dans cette fiche sont précisées à l'article R. 313-4 du code de la consommation.
Toutes les informations complémentaires que le prêteur souhaite vous donner sont fournies dans un document distinct de cette fiche.

 

 

2.4 - L'évaluation de votre dossier et le devoir de mise en garde

Avant de vous accorder un crédit, le prêteur doit avoir pu vérifier si vous serez en mesure de respecter les obligations du contrat de crédit, en particulier le respect des échéances de remboursement. Il doit pour cela procéder à une évaluation rigoureuse de votre solvabilité à partir d'informations sur :

 

  • vos revenus, votre épargne et vos actifs ;
  • vos dépenses régulières, vos dettes et vos autres engagements financiers.

Il doit également consulter le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers. Pour en savoir plus, consultez la fiche pratique INC J 264 "le fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers".

 

Il peut, en complément de l'évaluation de votre solvabilité, procéder à l'évaluation du bien immobilier à financer. Mais il doit dans ce cas faire appel à un expert en évaluation immobilière indépendant.

 

Le prêteur ou l'intermédiaire de crédit doit vous mettre en garde gratuitement lorsque, compte tenu de votre situation financière, un contrat de crédit peut induire des risques spécifiques pour vous (devoir de mise en garde).

 

Il doit également vous fournir gratuitement les explications adéquates vous permettant de déterminer si le ou les contrats de crédit proposés et les éventuels services accessoires sont adaptés à vos besoins et à votre situation financière. Ces explications comprennent notamment :

 

  • les informations contenues dans la fiche d'information standardisée européenne ;
  • les principales caractéristiques du crédit et les services accessoires proposés ;
  • les conséquences que le crédit et les services accessoires proposés peuvent avoir sur votre situation, y compris celles d'un défaut de paiement.

 

2.5 - La proposition effective de l'organisme financier : l'offre de prêt

Une fois que vous serez mis d'accord sur les modalités de financement de votre projet, le prêteur devra vous donner par écrit les conditions du prêt qu'il propose : c'est l'offre de prêt. Cette offre doit vous être adressée gratuitement sur papier ou sur un autre support durable (article L. 313-24 du code de la consommation).

Si une personne s'est portée caution pour vous, l'offre de prêt lui sera sou­mise dans les mêmes conditions.

L'offre est envoyée, gratuitement, et non remise de la main à la main, afin que votre accord ne puisse être antidaté.

 

Le contenu de l'offre

L'offre précise (article L. 313-25 du code de la consommation) :

 

  • l'identité des parties (prêteur, emprunteur) et éventuelle­ment des cautions ;
  • la nature et l'objet du prêt ;
  • les modalités du prêt : date et conditions de mise à dispo­sition des fonds, échéancier des amortissements ;
  • le montant du crédit : fractions périodiques disponibles, coût total, taux annuel effectif global (TAEG) et éventuellement modalités de l'indexa­tion du taux révisable.
  • Les stipulations, assuran­ces (décès, invalidité...), garanties (hypothèque, cautionnement par une société, caution personnelle) qui conditionnent la conclusion du prêt, ainsi que l'évaluation de leur coût ;
  • l'adhésion facultative à l'assurance groupe du prêteur ou le choix d'une autre assurance (voir la fiche de l'INC sur l'assurance emprunteur) ;
  • éventuellement, les conditions requises pour transférer les prêts à une tierce personne ;
  • les dispositions relatives à la durée de validité des condi­tions de l'offre et aux conditions de son acceptation ;
  • les frais d'étude et les conditions de perception lorsque le prêt est annulé à l'expiration du délai fixé pour la réalisa­tion du projet immobilier.

Le taux du prêt

Le taux devant obligatoirement être mentionné dans l'offre de prêt est le taux annuel effectif global (TAEG) (articles L. 313-25 et L. 314-1 et suivants du code de la consommation).

 

C'est un taux "tout compris", qui inclut :

 

  • tous les frais, taxes, commissions et rémunérations que peut entraîner un prêt (par exemple, les frais de dossier) ;
  • les primes ou cotisations d'assurance invalidité-décès, lorsque la souscription de cette assurance est obligatoire pour l'emprunteur.

Cette énumération n'est ni exhaustive ni limitative.

 

Il ne comprend pas :

 

  • les charges liées au prêt dont le montant ne peut être in­diqué avec précision avant la conclusion définitive du contrat (comme les honoraires d'officiers ministériels, le coût des garanties) ;
  • les primes ou cotisations d'assurance incendie, sauf si la souscription à l'assurance est une condition de l'octroi du prêt ;
  • l'indemnité de remboursement anticipé.

Le taux du prêt peut être indexé, mais seulement à comp­ter de la signature du contrat de prêt. Il ne peut varier pen­dant le délai de trente jours.

 

Le TAEG mentionné dans l'offre ne peut excéder le taux d'usure en vigueur au moment où celle-ci est consentie. Le taux d'usure est défini chaque trimestre et est consultable sur le site de la Banque de France ou le site du Ministère de l'économie/Trésor.

 

Il existe trois taux d'usure pour les prêts immobiliers :

 

  • un pour les prêts à taux fixe ;
  • un pour les prêts à taux variable ;
  • un pour les prêts relais.

Est usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues (article L. 314-6 du code de la consommation).

 

Sanction : Le fait de consentir un prêt à un taux usuraire est puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende 300 000  € (article L. 341-50 du code de la consommation).

 

 

Le tableau d'amortissement

Il permet à l'emprunteur de juger l'effort financier à four­nir. Il suivra l'évolution, sur la durée du prêt, de sa dette en capital. Les modalités de remboursement peuvent varier selon la progressivité prévue.

 

Pour les prêts à taux fixe, le tableau indique pour chaque échéance (mensuelle ou trimestrielle) (article L. 313-25 du code de la consommation) :

 

  • la date et le montant des échéances ;
  • le montant du capital amorti ;
  • le montant des intérêts à payer ;
  • le montant des frais accessoires (assurances) ;
  • le capital restant dû.

Illustration :

Exemple d'un prêt de 100 000 € sur 15 ans (180 mois) au taux annuel de 3,6 % (soit 0,3 % par mois) avec une prime d'assurance fixe de 30 € par mois. La mensualité globale est de 749,80 €.

La première mensualité va servir à payer : les intérêts du mois pour 300 € (0,3 % x 100 000 €), la prime d'assurance de 30  €, le reste correspondant au remboursement effectif du prêt, c'est-à-dire l'amortissement du capital (749,80 € - 300 €- 30 € = 419,80 €).

La dernière mensualité va servir à payer : les intérêts du mois pour 2,15 € (0,3 % x 717,65 €), la prime d'assurance de 30  €, l'amortissement du capital pour 717,65 € (749,80 € - 2,15 €- 30 €).

On voit qu'au fil du temps, la part du capital remboursé chaque mois augmente alors que le montant des intérêts  diminue.

 

Pour les prêts à taux révisables (ou variables), il n'est pas possible de fournir un tableau d'amortissement précis puisque le taux est susceptible d'évoluer.

 

Mais l'offre de prêt " doit être accompagnée d'une notice présentant les conditions et modalités de variation du taux d'intérêt et d'un document d'information contenant une simulation de l'impact d'une variation de ce taux sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Cette simulation ne constitue pas un engagement du prêteur à l'égard de l'emprunteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à son impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit. Le document d'information mentionne le caractère indicatif de la simulation et l'absence de responsabilité du prêteur quant à l'évolution effective des taux d'intérêt pendant le prêt et à son impact sur les mensualités, la durée du prêt et le coût total du crédit " (article L. 313-25 du code de la consommation).

 

La durée de l'offre : un mois

Le prêteur doit maintenir sa proposition au moins trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur. Toute­fois, il s'agit d'un délai minimal, et la validité de l'offre peut être maintenue pour une durée supérieure (article L. 313-34 du code de la consommation).

Si l'offre de prêt n'a pas été acceptée dans les délais, le prê­teur peut modifier les conditions de l'offre.

Toute modification des conditions d'obtention du prêt, notamment le montant ou le taux du crédit, donne lieu à la remise à l'emprunteur d'une nouvelle offre préalable.

 

Sanction : Le prêteur qui envoie une offre non conforme encourt une peine d'amende de 150 000  € (article L. 341-59 du code de la consommation). Il pourra en outre être déchu du droit des intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge (article L. 341-4 du code de la consommation).

 

 

2.6 - Pas de délai de rétractation mais un délai de réflexion

Pour vous permettre de faire jouer la concur­rence et de choisir un prêt adapté à vos besoins, aux meilleures conditions financières, la loi impose un délai de réflexion de dix jours. Durant ce délai, vous ne pouvez pas ac­cepter l'offre du prêteur. Il est de même pour vos éventuelles cautions (article L. 313-34 du code de la consommation).

Le jour de la réception de l'offre ne compte pas dans le dé­lai. Une offre reçue le premier jour du mois ne peut être ac­ceptée avant le onzième jour de ce mois. Le cachet de l'opérateur postal faisant foi, il est prudent de conserver les enveloppes.

L'acceptation de l'offre doit être donnée par courrier, le cachet de l'opérateur postal faisant foi ou tout autre moyen convenu entre les parties de nature à rendre certaine la date de l'acceptation par l'emprunteur.

Une acceptation anticipée de l'offre peut entraîner une ac­tion en nullité du contrat de prêt ainsi que des sanctions pénales.

 

Sanction : le prêteur qui fait souscrire un prêt immobilier sans que l'acceptation de l'offre ne comporte de date, ou comporte une date fausse de nature à faire croire qu'elle a été donnée après l'expiration du délai de réflexion, est puni d'une amende de 300 000  € (article L. 341-40 du code de la consommation).

 

Vous ne devez effectuer aucun versement à l'emprunteur ou à son intermédiaire avant l'acceptation de l'offre (article L. 313-35 du code de la consommation).

Vous ne pouvez faire aucun dépôt, ni souscrire ou avaliser aucun effet de commerce (lettre de change, billet à ordre), ni signer aucun chèque avant cette date. Il est d'ailleurs déconseillé aux particuliers d'utiliser les effets de commerce comme moyen de paiement.

Si une autorisation de prélèvement automatique sur un compte bancaire ou postal est signée, sa validité et sa prise d'effet sont subordonnées à celle du contrat de crédit.

 

Sanction : Le prêteur qui accepte de recevoir de l'emprunteur, ou pour son compte, un versement, un dépôt, un chèque, un effet de commerce, ou utilise une autorisation de prélèvement sur son compte bancaire, est puni d'une amende de 300 000 € (article L. 341-42 du code de la consommation).

 

 

3 - De la signature du contrat au remboursement complet de votre crédit

3.1 - L'interdépendance des différents contrats

 

L'interdépendance des prêts entre eux

Il faut souvent plusieurs prêts pour financer un projet immobilier. Si l'un des prêts complémentaires sur lequel vous comptiez est refusé, les autres contrats de crédit seront annulés si les conditions suivantes sont remplies (article L. 313-37 du code de la consommation) :

 

  • le prêt refusé était supérieur à 10 % du crédit total ;
  • vous avez informé les autres prêteurs que vous sollicitiez d'autres prêts.

La loi ne précise pas dans quels délais les prêts complé­mentaires doivent être obtenus. Faites attention aux dates fixées pour l'acceptation des offres de prêt et pour la conclusion du contrat immobilier.

 

L'interdépendance du contrat de prêt et du contrat immobilier

 

Il arrive que le projet immobilier n'aboutisse pas : le contrat n'est pas signé, ou il est résilié. C'est le cas lorsque le permis de construire est refusé. Le contrat de prêt peut être résilié à son tour.

Afin de ne pas trop pénaliser les prêteurs, la loi a fixé un délai de quatre mois à l'emprunteur pour conclure l'opéra­tion immobilière. Mais il s'agit d'un délai minimal que l'on peut convenir d'allonger, afin de tenir compte, notam­ment, d'une clause "résolutoire" ou "suspensive" insérée dans le contrat immobilier.

 

Le délai de quatre mois court à compter de l'acceptation de l'offre de prêt par l'emprunteur et les cautions.

A l'expiration du délai convenu, l'offre de prêt sera ca­duque. Le prêteur pourra maintenir son offre ou exiger le remboursement des sommes qui ont été débloquées, les intérêts afférents, ainsi que les frais d'étude (article L. 313-38 du code de la consommation).

Le montant et les conditions de perception de ces frais d'étude doi­vent figurer dans l'offre préalable. Leur montant est pla­fonné à 0,75 % du montant du prêt, sans que la somme ainsi calculée puisse excéder 150 euros (hors taxe) (article R. 313-22 du code de la consommation).

 

Sanction : Le prêteur qui retiendrait des frais excédant ce plafond, encourt une peine de 300 000  €.

 

Si la vente est annulée ou résolue après le délai fixé, l'em­prunteur ne peut demander que le remboursement par anticipation.

Pour éviter d'être pénalisé, il suffit de ne pas signer le contrat de prêt avant d'avoir la certitude que le projet im­mobilier ne rencontrera pas d'obstacle.

 

Par exemple :

  • attendre le permis de construire avant de faire débloquer les fonds pour le paiement du prix du terrain ;
  • prévoir une clause particulière dans le contrat de prêt :

« Le contrat de prêt sera résolu à l'expiration du délai de X mois ou par l'effet des clauses suspensives ou résolutoires prévues au contrat immobilier et qui sont susceptibles de provoquer sa résolution ou d'empêcher sa conclusion », voire « toute résiliation provoquée par une infraction à la ré­glementation ».

La portée de cette clause sera limitée dans le temps, à la date prévue pour que l'évènement attendu se réalise (ob­tention du permis de construire).

 

 

3.2 - La domiciliation des revenus

Il est très fréquent que le contrat de prêt comporte une clause vous obligeant à domicilier vos revenus dans la banque qui vous octroie le crédit, sous peine de déchéance du terme. En d'autres termes, si vous ne virez pas ou arrêter de virer vos revenus (salaires plus souvent) sur le compte de la banque, celle-ci serait en droit de vous demander le remboursement immédiat et intégral du prêt.

 

Or, la Commission des clauses abusives (CCA) a, dans sa recommandation n° 04-03 du 27 mai 2004, considéré comme abusives les clauses ayant pour effet « d'obliger l'emprunteur, pendant toute la durée du prêt, à verser l'ensemble de ses revenus sur un même compte dans l'établissement prêteur, sous peine de déchéance du terme, alors même que l'emprunteur aura ponctuellement satisfait à ses remboursements et de ne prévoir aucune contrepartie individualisée à cette obligation au profit de l'emprunteur ».

 

Par conséquent, si le contrat précise que la domiciliation des revenus a une contrepartie (un taux d'intérêt minoré le plus souvent), cela n'est pas abusif pour la CCA. Par contre, s'il n'existe aucune contrepartie, le fait pour la banque de demander le remboursement immédiat du prêt parce que vos revenus n'y seraient plus domiciliés, serait probablement considéré par un juge comme abusif et donc sans objet.

 

  Une ordonnance n°2017-1090 du 1er juin 2017 prévoit un encadrement juridique de la clause de domiciliation des revenus et a créé les articles L.313-25-10° et L. 313-25-1 du code de la consommation. En contrepartie de l'insertion d'une clause de domiciliation des revenus dans le contrat de crédit immobilier, il est prévu que le prêteur doit consentir un avantage individualisé à l'emprunteur et que la clause ne puisse être imposée à l'emprunteur au-delà d'un délai de 10 ans maximum. A défaut, la clause serait réputée non écrite (article L. 341-34 du code de la consommation). Ces dispositions s'appliquent aux offres émises à compter du 1er janvier 2018, et aux avenants modifiant les contrats conclus à la suite de ces offres.

 

 

3.3 - Les obligations spécifiques aux prêts à taux variable

Pour les prêts dont le taux est variable (ou révisable), l'organisme de crédit est tenu, une fois par an, de porter à votre connaissance le montant du capital restant dû à rembourser. 

 

Le taux d'intérêt doit être indexé sur un référentiel "objectif", c'est-à-dire un indice sur lequel l'organisme de crédit n'a pas prise (par exemple un taux de marché l'Euribor). En effet, la Commission des clauses abusives (CCA) a considéré, dans sa recommandation n° 04-03, qu'était abusive la clause ayant pour objet de "laisser au seul prêteur professionnel, fut-il une société coopérative, le choix de la variation du taux d'intérêt ainsi que de son amplitude ou de conférer à son organe de direction un pouvoir de décision en cas de différend".

 

En cas de modification du taux d'intérêt, à partir du moment où celui-ci est censé être indexé sur un indice objectif, l'organisme de crédit n'est pas obligé de vous informer de la modification du taux effectif global (TEG) qui en découle (Cass, 1re civ., 20 déc. 2007 n°06-14690).

 

La modification du taux a une conséquence soit sur la durée du prêt, soit sur le montant de la mensualité. Certains contrats vous permettent de choisir, sachant que financièrement parlant, il est plus intéressant pour vous d'augmenter la mensualité en cas de hausse du taux et de raccourcir la durée en cas de baisse. Si l'organisme de crédit vous laisse le choix,  il doit également vous indiquer les modalités vous permettant d'exprimer ce choix (information, délai...). En effet, la CCA, dans la même recommandation de 2004, a considéré qu'était abusive la clause qui a pour objet de « prévoir, en cas de variation du taux d'intérêt du prêt, soit à la hausse soit à la baisse, la possibilité pour l'emprunteur de modifier les modalités de ses remboursements en choisissant l'une des options proposées par le prêteur, à condition de respecter un certain délai pour exprimer ce choix, sans indiquer, la date à laquelle le prêteur devra communiquer à l'emprunteur toutes les informations utiles pour exercer son choix.

 

 

3.4 - La renégociation du prêt

En cas de renégociation de prêt, un avenant doit être signé dans les mêmes condi­tions que pour une offre nouvelle (article L. 313-39 du code de la consommation).

 

L'avenant au contrat com­prend :

 

  • un échéancier des amortissements, détaillant pour chaque échéance le capital restant dû ;
  • le taux annuel effectif global ainsi que le coût du crédit calculés sur la base des seules échéances et frais à venir (jusqu'à la date de la révision du taux, ainsi que les conditions et mo­dalités de variation du taux, pour les prêts à taux variables).

Vous disposez d'un délai de réflexion de dix jours à compter de la réception des informations mentionnées ci-dessus.

 

L'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de l'opérateur postal faisant foi ou tout autre moyen convenu entre les parties.

 

3.5 - Le remboursement anticipé

Le prêteur ne peut pas refuser le remboursement par anti­cipation d'une partie ou de la totalité du prêt, à moins que les remboursements soient égaux ou inférieurs à 10 % du montant initial du prêt, sauf s'il s'agit de son solde (article L. 313-47 du code de la consommation). Lorsque vous avez contracté plusieurs prêts dans le même établissement, le seuil de 10 % s'applique pour chaque prêt.

 

Pour compenser le manque à gagner que lui cause ce rem­boursement - perte des intérêts, coût du refinancement des prêts à long terme -, la loi permet au prêteur de récla­mer une indemnité au titre des intérêts non encore échus.

 

Le montant de cette indemnité dépend des mensualités qui restent à payer. Il est plafonné par décret : l'indemnité ne peut excéder la valeur d'un semestre d'intérêt sur le ca­pital remboursé au taux moyen du prêt, sans pouvoir dé­passer 3 % du capital restant dû avant le remboursement (article R. 313-25 du code de la consommation).

 

Exemple : Vous devez encore 100.000  € (capital restant dû) à votre banque sur un prêt initial de 150 000  € ; le taux d'intérêt est de 4,2 % par an, soit 0,35 % par mois.

Si vous remboursez la totalité, alors l'indemnité sera d'un semestre d'intérêt, soit 100.000 € x 0,35 % x 6 mois = 2 100 €. Cette somme est bien inférieure à 3 % du capital restant dû (3 % x 100 000  €= 3 000 €) donc l'indemnité sera bien de 2 100  €.

Si vous remboursez seulement 50.000 € (remboursement anticipé partiel), alors l'indemnité sera de 50 000 € x 0,35 % x 6 mois = 1 050  €. Cette somme est bien inférieure à 3 % du capital restant dû (3 % x 100 000  €= 3000  €) donc l'indemnité sera bien de 1 050  €.

Si vous souhaitez rembourser seulement 10 000  €, alors la banque sera en droit de le refuser car cette somme est inférieure à 10 % du montant initial du prêt (10 % x 150 000  € = 15 000 €).

 

Aucun autre frais ou coût ne peut vous être réclamé. Vous pouvez négocier à la baisse le montant de l'indemnité, de préférence avant la signature de votre contrat.

Certains contrats de prêt comportent des taux d'intérêts différenciés selon les périodes de remboursement lorsque les mensualités sont progressives. Dans ce cas, l'indemnité peut être majorée de la somme permettant d'assurer au prêteur, sur la durée courue depuis l'origine, le taux moyen prévu lors de l'octroi du prêt. Mais vous devez dans ce cas être dûment informé du montant maximum que vous auriez à payer.

 

Dans tous les cas, le prêteur doit vous communiquer gratuitement et sans tarder, après réception de votre demande de remboursement par anticipation, sur support papier ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à l'examen de cette faculté. Ces informations chiffrent au moins les conséquences qui s'imposeront si vous décidez de rembourser votre crédit avant l'expiration du contrat de crédit.

 

Les exceptions

Pour les contrats conclus à compter du 29 juin 1999, aucune indemnité n'est due par l'emprunteur en cas de rembour­sement par anticipation lorsque le remboursement est motivé par la vente du bien immobilier faisant suite à un changement du lieu d'activité professionnelle de l'em­prunteur ou de son conjoint, par le décès ou par la cessa­tion forcée de l'activité professionnelle de ces derniers (article L. 313-48 du code de la consommation).

 

 

3.6 - La suspension du contrat de crédit

Cette possibilité ne concerne pas les ventes, mais seule­ment les contrats de construction (article L. 313-44 du code de la consommation).

Au cours de l'exécution du contrat de construction, des contestations peuvent s'élever sur l'interprétation d'une clause ou le respect des engagements pris par le profes­sionnel. Le juge peut dans ce cas autoriser l'acquéreur à suspendre ses remboursements jusqu'au règlement du liti­ge. Cette disposition facilite le recours au tribunal, puis­qu'elle évite que le coût des frais de procédure ne s'ajoute aux mensualités du prêt à rembourser.

 

Trois conditions :

  • le recours au crédit doit être mentionné dans le contrat principal ;
  • le litige doit être en lien avec l'exécution du contrat principal ;
  • le prêteur intervient dans l'instance ou est mis en cause par l'une des parties en litige.

Cette mesure de suspension cause un préjudice au prê­teur, il pourra donc réclamer une indemnité dont le mon­tant sera fixée par le juge.

 

 

3.7 - En cas de difficultés pour rembourser votre crédit

Les droits du prêteur

 

  • L'organisme de crédit peut demander la résolution du contrat lorsque les échéances du prêt ne sont pas payées.

Il peut exiger (article L. 313-51 du code de la consommation) :

 

- le remboursement immédiat du capital restant dû ;

- le paiement des intérêts échus ;

- le paiement des intérêts de retard des sommes dues jusqu'à leur règle­ment effectif, au taux du prêt indiqué dans le contrat ;

- une indemnité calculée en fonction de la durée du contrat restant à courir, si elle a été prévue par le contrat. Cette indemnité est limitée à 7 % des sommes dues au titre du capital restant dû, ainsi que les intérêts échus et non versés (article R. 313-28 du code de la consommation) ;

- le remboursement, sur justification, des frais taxables oc­casionnés au prêteur par la défaillance de l'emprunteur.

 

Les frais taxables, sont les frais de procédure que le tribu­nal laisse à la charge du perdant : les dépens (émoluments des secrétariats, frais de mesures d'instruction...). Mais le prêteur ne peut réclamer le remboursement forfaitaire des frais de recouvrement (article L. 313-52 du code de la consommation).

 

  • Si l'organisme de crédit n'exige pas le remboursement immédiat du capital, il peut majorer le taux d'intérêt du capital restant dû jusqu'à la régularisation du cours des échéances (à condition qu'une clause pénale figure au contrat de prêt). Cette majoration ne pourra excéder trois points d'intérêts (article R. 313-26 du code de la consommation).

  Le juge peut réduire le montant de l'indemnité, s'il la juge excessive au regard du préjudice réellement subi par le prêteur (article 1231-5 du code civil).

 

Cas particulier du prêt à taux zéro (PTZ) : en cas de défaillance de l'emprun­teur, le prêteur qui accorde des délais de paiement peut appliquer un intérêt qui ne peut excéder le plus élevé des taux d'intérêts maximaux des prêts conventionnés garantis par l'Etat, applicable au moment de l'offre de prêt, dans la limite des 7 %.

 

Vos droits

Si vous ne pouvez pas faire face aux échéances de votre prêt immobilier et que le prêteur refuse tout arrangement, déposez une demande de délai auprès du juge d'instance. Il pourra vous accorder, après examen du dossier, une suspension des remboursements pour une pério­de de deux ans maximum, non renouvelable. Il peut égale­ment décider que, durant ce délai de grâce, les échéances porteront intérêt à un taux réduit (au moins le taux légal) ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital (article 1343-5 du code civil).

 

Les mensualités non payées pendant le délai de grâce ne se­ront pas réclamées à la fin du délai. Le juge peut les reporter à la fin du contrat de prêt, à condition que la durée du prêt initial ne soit pas allongée de plus de deux ans. Il peut aussi rééchelonner les mensualités non payées sur la durée du prêt restant à courir. S'il préfère réexaminer la situation à la fin du délai de grâce, il choisira de surseoir à statuer, c'est-à-dire qu'il prendra sa décision à ce moment-là.

 

Si vous êtes en situation de surendettement, c'est-à-dire que vous rencontrez de graves difficultés financières ne vous permettant plus de faire face à l’ensemble de vos dettes, la suspension des mensualités pendant deux ans peut se révéler insuffisante. Vous pouvez vous adresser à la Commission de surendettement de votre département (elle siège à la Banque de France). Vous pouvez utliliser la lettre type " A la suite de difficultés financières, vous déposez un dossier auprès de la commission de surendettement".  Pour plus d'information, consultez la fiche de l'INC sur le surendettement.

 

 

4 - Les recours et les sanctions

Les dispositions relatives au crédit immobilier sont d'ordre public. On ne peut pas y déroger. L'inobservation d'obligations contractuelles ou précontractuelles imposées par la loi aux prêteurs est civilement et pénalement sanctionnée.

 

Les recours amiables

En cas de litige avec votre prêteur, vous pouvez dans un permier temps, écrire à votre établissement de crédit. En cas de non-réponse ou de désaccord, écrivez alors au service clientèle ou réclamation de cet établissement.

 

Enfin, vous pouvez saisir le médiateur de la consommation, de préférence par lettre recommandée avec accusé de réception. Récapitulez clairement les faits de votre litige ainsi que les démarches déjà effectuées auprès de votre établissement de crédit, puis de son service relations clientèle. Joignez-y les photocopies des pièces justificatives.

 

Les coordonnées du médiateur doivent figurer sur votre relevé de compte et sur le site web de votre établissement de crédit.

 

Faites-vous au besoin aider par une association agréée de consommateurs ou un professionnel du droit.

 

Vous pouvez utiliser la lettre type " Vous saisissez le médiateur bancaire pour règler un litige avec votre banque".

 

Le médiateur doit vous répondre dans les trois mois suivant sa saisine. Si la solution proposée ne vous convient pas, vous pouvez saisir le tribunal compétent.

 

Les recours judiciaires

Vous pouvez décider d'agir en justice. Le législateur n'a pas prévu de privilège de juridiction comme cela existe pour la crédit à la consommation. Par conséquent, ce sont les règles du droit commun de la procédure civile qui s'appliquent. Le tribunal compétent, pour les litiges liés au crédit immobilier, dépend de la valeur sur laquelle porte ce litige.

 

Le tribunal d'instance a une compétence exclusive si le litige porte sur les délais de grace (article R. 313-33 du code de la consommation).

 

La prescription de l'action en matière de crédit immobilier obéit donc aux règles du droit commun. Ainsi, toute action en matière de crédit immobilier se prescrit donc par cinq ans sauf si des prescriptions plus courtes sont édictées

 

 

CONCLUSION

Un crédit immobilier vous engage sur de longues années et il peut être difficile de s'en défaire compte tenu des indemnités demandées en cas de remboursement anticipé. C'est pourquoi le législateur a souhaité donner des droits importants pour le consommateur.

 

D'une part, votre acquisition immobilière et son financement global sont d'un point de vue juridique interdépendants : cela vous permet de tout annuler en cas de problème sur la vente ou sur l'un de vos prêts.

 

D'autre part, il pose le principe d'un délai de réflexion de 10 jours avant de vous engager dans un crédit. Souvent perçu comme une contrainte retardant la réalisation de votre projet, ce délai est une opportunité pour bien comprendre à quoi vous vous engager et éventuellement faire jouer la concurrence.

 

Emmanuel Masset-Denèvre,

Economiste à l'Institut National de la Consommation

Mise à jour  Corinne Lamoussière-Pouvreau

Juriste à l'Institut National de la Consommation 

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