Coronavirus (Covid-19) : comment aménager le remboursement de votre crédit en cas de baisse de revenus ?


Face à la crise sanitaire du coronavirus, un certain nombre d’emprunteurs risquent de rencontrer des difficultés pour rembourser leur crédit immobilier ou à la consommation, du fait d’une baisse de leurs revenus : chômage partiel ou arrêt de travail pour certains salariés, baisse ou arrêt de l’activité pour les indépendants, les commerçants, les professions libérales, les micro-entrepreneurs...


En France, l’Etat prenant en charge l’indemnisation des salariés contraints de rester chez eux, il n’y a pas eu de mesures exceptionnelles sur la suspension des remboursements des échéances de prêts immobiliers, contrairement à l’Italie où la suspension a été autorisée jusqu’au 31 décembre 2020 pour les crédits concernant la résidence principale.

 

Dans ce contexte de crise sanitaire, certains emprunteurs s’inquiètent de leur capacité à rembourser leurs échéances de crédit et se demandent s’il est possible de suspendre ou de reporter le remboursement des mensualités de leur prêt. Et comment faire ?

 

L’Institut national de la consommation répond aux questions que vous vous posez sur le sujet.

 

1 - Quelles sont les démarches à effectuer ?

2 - Quelles sont les solutions possibles ?

3 - Que faire en cas de refus de la banque ?

 

 

1 - Quelles sont les démarches à effectuer ?

 

1.1. Relisez votre contrat

Dans un premier temps, il est important de relire votre offre de prêt. En effet, si la plupart des banques permettent le report partiel ou total ou la réduction des mensualités en cas de difficultés financières, toutes ne le prévoient pas.

Il faut que cela soit inscrit clairement dans votre contrat. A défaut, la banque peut refuser votre demande.

 

Si cela est prévu dans le contrat, il faut voir quelles en sont les conditions : une ou plusieurs fois par an, ancienneté du contrat de prêt…

 

1.2. Contactez votre conseiller bancaire

Ensuite, contactez rapidement votre conseiller bancaire, pour vérifier avec lui ce qui est prévu dans votre contrat.

 

Pour cela, vous pouvez vous aider de la lettre type de l’INC : Vous demandez des délais de paiement à la banque qui vous accorde un crédit.

 

Même si rien n’est prévu dans votre contrat de crédit, il est possible de négocier à l’amiable avec votre banquier. Ce dernier pourra accepter un report temporaire, afin d’assurer la continuité du remboursement du crédit et d’éviter que celui-ci ne passe en défaut de paiement. 

 

  Demandez une simulation à votre banquier, car le report ou la baisse des mensualités a une répercussion directe sur le coût total du prêt en raison de l’allongement de la durée de remboursement.

 

Cela peut-il être pris en charge par l’assurance emprunteur ?

 

L’assurance emprunteur de base couvre le décès, l’invalidité et l’incapacité temporaire de travail.

Même si vous disposez d’une garantie perte d’emploi, celle-ci pourrait se révéler inutile, car généralement les garanties perte d’emploi ne s’activent que sur des durées limitées et après des délais de carence, de l’ordre de 6 mois de chômage minimum. Elles ne couvrent pas l’intégralité des mensualités.

 

 

2 - Quelles sont les solutions possibles ?

2.1. La suspension temporaire du crédit

La première solution consiste à suspendre le paiement des échéances de votre crédit, c’est-à-dire d’obtenir un report de vos échéances pendant une certaine période.

 

Vérifiez que cette clause est bien inscrite dans votre contrat, et demandez à votre banquier à en bénéficier.

Pour cela, adressez-lui un courrier ou un mail via votre espace client.

Il vous remettra un avenant vous précisant les détails du report d’échéances, ainsi qu’un nouveau tableau d’amortissement indiquant le montant et la durée du prêt.

La banque ne peut pas refuser ce report dès lors que le contrat de prêt contient cette clause.
 

Il existe deux types de report d’échéances :

 

  • le report d’échéance partiel : vous suspendez le remboursement du capital pendant une période définie, mais continuez de rembourser les intérêts. Le versement mensuel de l’assurance du prêt est maintenu,
  • le report d’échéance total : vous ne remboursez ni le capital ni les intérêts pendant une période donnée. Mais, vous continuez de rembourser l’assurance du prêt chaque mois.

A l’issue de cette période de suspension, vous reprenez le remboursement mensuel de votre crédit (capital, intérêts et assurance du prêt). Les mensualités reportées sont à payer à la fin du crédit.

 

Certaines banques ont assoupli les conditions de report pour en faciliter le recours. Renseignez-vous auprès de votre conseiller bancaire.

 

 Le report d’échéances ne s’applique pas à tous les crédits immobiliers. Cela concerne : les prêts immobiliers à taux fixe, les prêts immobiliers à taux révisable (taux variable) et les prêts immobiliers à taux mixte.

 

En revanche, l’emprunteur ne peut pas bénéficier d’un report d’échéances s’il a souscrit : un prêt à taux zéro, un prêt relais, un prêt in fine (qui permet à l’emprunteur de ne payer que les frais d’assurance et les intérêts pendant la durée du prêt), un prêt conventionné, un prêt à l’accession sociale (PAS), un prêt épargne logement (PEL).

 

La suspension du paiement des mensualités de votre crédit peut aller de un à douze mois, en une ou plusieurs fois. Mais attention, cela peut avoir un coût élevé, car la durée de remboursement est allongée et génère des intérêts supplémentaires.

 

Dans le cas d’un report partiel, vous devez payer des intérêts intercalaires constants qui sont ajoutés au coût total du prêt.

Dans le cas d’un report total, le capital restant dû est augmenté des intérêts impayés.

Les primes de l’assurance emprunteur resteront prélevées.

 

2.2. La modulation des échéances de prêt

Vous pouvez bénéficier d’une autre solution en cas de difficulté de remboursement de votre crédit : la modulation d’échéances. Il s’agit de négocier avec votre banquier une baisse des mensualités initialement définies.

 

Pour en bénéficier, une clause de modularité doit apparaître dans votre contrat de prêt, ce qui permet de suspendre le remboursement des échéances, pour une durée généralement comprise entre 2 et 3 mois.

Cette clause pourra être activée gratuitement sur demande à votre conseiller, en cas de perte d’emploi, de baisse de revenus ou d’accident de la vie. La banque ne pourra alors pas refuser de vous l’appliquer. Cela vous autorise à baisser vos mensualités pour faire face à une situation financière difficile.

 

Mais, attention, cela engendre la rédaction d’un avenant au contrat. Si vous anticipez une baisse de vos revenus pour les semaines, voire les mois à venir, contactez rapidement votre conseiller bancaire.

Les banques donnent souvent la possibilité d’effectuer une seule modulation de prêt par an. À chaque demande de changement d’échéance, la banque calcule un nouveau tableau d’amortissement prenant en compte la baisse de la mensualité du crédit.

Le coût total du crédit peut également augmenter, mais cela est souvent plus avantageux qu’un report d’échéances, car vous continuez de payer une partie des mensualités.

 

  Contrairement à la suspension de prêt, la modulation des échéances de prêt immobilier est valable pour tous les types de prêts.

 

La plupart des banques le propose avec la possibilité de diminuer les mensualités de 10 à 30 % de l’échéance selon les banques. Cela est réservé à ceux qui remboursent un crédit immobilier depuis deux ans minimum (cela ne s'applique pas aux prêts les plus récents) et dans la limite d’un allongement de la durée du prêt de deux ans (ou 12 mois) maximum. 

 

  Si vous demandez à votre banque de baisser vos mensualités en augmentant la durée restante de plus de 24 mois, cela est alors assimilé à une restructuration de dettes. Cela n’entre donc plus dans le champ de la modularité de prêt.

 

Dans tous les cas, il est recommandé de voir avec votre conseiller bancaire la solution la plus adaptée à votre situation financière, et selon les clauses de cotre contrat. Si aucune clause de modularité ne figure dans votre contrat, vous pouvez essayer de négocier une solution avec votre banquier.

 

2.3. Négocier avec votre banquier

Si le report des mensualités ou leur réduction ne sont pas prévues dans votre contrat, il est possible de négocier à l’amiable avec votre banquier. Il pourra accepter un report temporaire, afin d’assurer la continuité du remboursement du crédit et d’éviter que celui-ci ne passe en impayé. 

 

La suspension d’un crédit immobilier pour la vente d’un bien

 

Dans le cas où vous vendez un bien immobilier en cours de remboursement, et que vous avez souscrit un emprunt pour l’acquisition d’un nouveau bien immobilier, vous pouvez demander à votre banque une suspension du crédit jusqu’à la vente du bien concerné. L’argent de la vente viendra solder le capital restant dû.

 

Durant la suspension de votre crédit, vous devez toujours payer les intérêts et l’assurance du prêt.

 

En cas de difficultés de remboursement d'un prêt étudiant

 

Pour les prêts étudiants, il y a souvent une période de franchise ou "différé de remboursement", qui peut être partielle ou totale, souvent entre 2 et 10 ans, pendant laquelle l’étudiant ne rembourse que les intérêts et la cotisation d’assurance (différé partiel) ou que la cotisation d’assurance (différé total). A la fin de cette période de franchise, souvent à la fin des études, commence la période de remboursement (phase d'amortissement) du crédit.

 

En cas de difficultés financières, l’étudiant doit contacter rapidement son conseiller bancaire pour trouver une solution (allégement des mensualités, report de remboursement...).

Des aides sont aussi possibles, voir le site du CIDJ.  L'étudiant peut aussi se rapprocher de son CROUS.

 

 

3 - Que faire en cas de refus de la banque ?

Vous rencontrez des difficultés financières et la banque refuse une suspension de paiement.

Dans ce cas, vous pouvez obtenir une suspension judiciaire des échéances du prêt.

 

En effet, l’article L. 314-50 du Code de la consommation prévoit que l’emprunteur peut solliciter la suspension des échéances du prêt. Il doit alors saisir le tribunal judiciaire afin d’obtenir des délais, pendant au maximum deux ans. Durant ce délai, aucune échéance ne sera due. Il peut aussi demander qu’au cours de ces deux années, les sommes ne produiront pas intérêts.

 

Pour cela, vous devez justifier de vos difficultés et démontrer qu’après le délai de suspension demandé, vous pourrez reprendre normalement le paiement de vos échéances, c’est-à-dire que les difficultés financières rencontrées sont temporaires.

 

En effet, si la perte de ressources est définitive et que la situation risque de ne pas s’améliorer, vous avez intérêt à recourir à la procédure de surendettement.

 

Pour vous aider dans vos démarches, vous pouvez vous adresser à une association de consommateurs et utiliser la lettre type de l’INC : "A la suite de difficultés financières, vous déposer un dossier auprès de la commission de surendettement". 

 

> Pour en savoir plus, lire l'article publié dans 60 millions de consommateurs "Crédit immobilier : allégez vos mensualités face à la crise".

 

Corinne Lamoussière-Pouvreau

Juriste à l’Institut National de la consommation

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