L'action de groupe, un an après : cinq actions ont été lancées


Le dispositif de l'action de groupe créé par la loi Hamon du 17 mars 2014, est entré en vigueur le 1er octobre 2014. Cinq actions ont été introduites depuis un an et le champ d'application de l'action de groupe va s'élargir notamment au domaine de la santé.


Présentée comme la mesure phare de la loi Hamon du 17 mars 2014, l'action de groupe permet à un groupe de consommateurs placés dans une situation similaire ou identique (abonnés, clients), victimes d'un manquement d'un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles, leur ayant causé un préjudice matériel, d'obtenir réparation par une seule action en justice. Cette action doit être introduite par l'une des quinze associations de consommateurs agréées au niveau national.

 

Le dispositif permettant sa mise en oeuvre est entré en vigueur le 1er octobre 2014. Sur ce dispositif, voir l'article de l'INC " Actions de groupe : entrée en vigueur du dispositif le 1er octobre 2014 ".  

 

Au 30 septembre 2015, cinq actions ont été introduites dont trois dans le domaine de l'immobilier locatif (UFC-Que Choisir contre Foncia, SLC-CSF contre Paris Habitat-OPH, CNL contre Immobilière 3F), une dans le domaine financier (CLCV contre Axa-Agepi) et une dans le domaine des communications électroniques (Familles Rurales contre SFR).

Quatre actions en sont au stade de la première phase, soit celle de la recevabilité de l'action et de jugement sur la responsabilité du professionnel. Une action, celle diligentée par l'association SLC-CSF, a fait l'objet en mai 2015 d'un accord transactionnel.

 

Les cinq actions de groupe

Ces actions sont présentées ci-après dans l'ordre de leur introduction en justice.

 

UFC-QUE CHOISIR / FONCIA

Secteur/pratique contestée Immobilier/location/parc privé
Facturation d'un service d'avis d'échéance (expédition des quittances)
Consommateurs concernés Locataires Foncia victimes de cette facturation depuis 2009 (318 000 locataires)
Montant du préjudice individuel (estimé par l’association)

2,30 €/mois, soit 27,60 €/an

Justificatifs à conserver (liste indicative)

Pièces prouvant la facturation du service d'avis d'échéance

Tribunal de grande intance/date d'introduction de l'action

TGI Nanterre - 1er octobre 2014

Etape de la procédure Recevabilité (en cours d'examen)
Pour plus d'informations www.quechoisir.org

 

 

SYNDICAT DU LOGEMENT ET DE LA CONSOMMATION/CONFEDERATION

SYNDICALE DES FAMILLES (SLC-CSF) / PARIS HABITAT-OPH

Secteur/pratique contestée

Immobilier/parc social

Facturation dans les charges des frais liés au dispositif de télésurveillance des ascenseurs

Consommateurs concernés Locataires Paris-Habitat depuis novembre 2011 (soit près de 100 000 locataires), pendant 3 ans (2011, 2012, 2013)
Montant du préjudice individuel (estimé par l’association) 10 €/an environ
Justificatifs à conserver (liste indicative) Décompte annuel de charges
Tribunal de grande intance/date d'introduction de l'action TGI Paris - 14 octobre 2014
Etape de la procédure

Protocole transactionnel (19 mai 2015)

Selon les cas, remboursement des sommes ou déduction des charges locatives

Pour plus d'informations www.la-csf.org

 

 

CLCV / AXA-AGIPI

Secteur/pratique contestée Services financiers/assurance-vie
Non-respect du taux de rémunération garanti de 4,50 % par an pour l'assurance-vie CLER
Consommateurs concernés Titulaires d'un contrat CLER ouvert avant le 1er juin 1995
Montant du préjudice individuel (estimé par l’association)

 

Montant variant selon les montants épargnés, généralement compris entre 1 500 € et 4 000 € dans la majorité des cas

Justificatifs à conserver (liste indicative)

Certificat d'adhésion et ses avenants

Total des sommes versées avant le 1er juin 1995

Situation du compte CLER à fin 2013

Tribunal de grande intance/date d'introduction de l'action TGI Nanterre
28 octobre 2014
Etape de la procédure

Recevabilité (en cours d'examen)

Pour plus d'informations

www.clcv.org

Communiqué de presse

 

 

CONFEDERATION NATIONALE DU LOGEMENT (CNL) / IMMOBILIERE 3F

Secteur/pratique contestée Immobilier/location/parc social
Consommateurs concernés

Facturation de pénalités de 2 % pour retard de loyer

Locataires 3F ayant payé des pénalités depuis novembre 2009

Montant du préjudice individuel (estimé par l’association) Quelques dizaines à quelques centaines d'euros

 

Justificatifs à conserver (liste indicative)

Contrat de location

Quittances indiquant les pénalités
Lettre de relance
Carte d’identité

Tribunal de grande intance/date d'introduction de l'action TGI Paris - Décembre 2014
Etape de la procédure Recevabilité (en cours d'examen)
Pour plus d'informations www.lacnl.com

 

 

 

FAMILLES RURALES / SFR

Secteur/pratique contestée

Communications électroniques/commercialisation des offres mobiles 4G

Pratique commerciale trompeuse/vente d'un téléphone 4G sans informer le consommateur des limites de couverture du territoire

Consommateurs concernés Fin 2013
Montant du préjudice individuel (estimé par l’association)

Différence entre le forfait 3G et le forfait 4G

Justificatifs à conserver (liste indicative) Facture de l'abonnement SFR
Facture d'achat du téléphone mobile (si l'offre souscrite n'incluait pas l'achat du mobile)
 
Tribunal de grande intance/date d'introduction de l'action TGI Nanterre - 12 mai 2015
Etape de la procédure

Recevabilité (en cours d'examen)

Pour plus d'informations www.famillesrurales.org

 

Le champ d'application de l'action de groupe élargi au domaine de la santé et de la discrimination

Outre le domaine de la consommation, l'action de groupe sera bientôt étendue au domaine de la santé. Le projet de loi relatif à la santé, n° 2302, déposé le 15 octobre 2014 devant l'Assemblée nationale, comporte un article 45 qui crée une action de groupe construite sur un modèle similaire à celui de la loi Hamon. Il prévoit, dans un nouvel article L. 1143-1 du code de la santé publique qu'une " association d’usagers du système de santé agréée (...) peut agir en justice afin d’obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des usagers du système de santé placés dans une situation identique ou similaire et ayant pour cause commune un manquement d’un producteur, ou d’un fournisseur de l’un des produits mentionnés au II de l’article L. 5311-1 (médicaments, dispositifs de santé...) ou d’un prestataire utilisant l’un de ces produits à leurs obligations légales ou contractuelles." Seuls les préjudices corporels pourront faire l'objet d'une indemnisation, à l'exclusion donc des préjudices moraux. Le projet, objet d'une procédure accélérée, a été adopté en 1ère lecture par l'Assemblée nationale, le 14 avril 2015, et est en cours de discussion au Sénat (texte). L’action de groupe devrait entrer en vigueur au plus tard le 1er juillet 2016, ou à une date antérieure fixée par décret en Conseil d’État.

 

Une autre action de groupe est initiée dans le domaine des discriminations. La proposition de loi de MM. LE ROUX et HAMMADI instaure une action de groupe en matière de discrimination et de lutte contre les inégalités, n° 1699, a été déposée en janvier 2014. De telles discriminations interviennent notamment dans le secteur du logement et des services. Ainsi, " Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et se proposant par ses statuts de lutter contre les discriminations, ainsi que toute organisation syndicale représentative au sens de l’article L. 2121-1 du code du travail, peut agir (...) afin d’obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des personnes placées dans une situation comparable et ayant pour cause une discrimination directe ou indirecte au sens de l’article 1er de la loi du 27 mai 2008 modifiée par la loi du 6 août 2012 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, qui soit imputable aux personnes physiques ou morales." Le projet a été adopté par l'Assemblée nationale, le 10 juin 2015 (texte), et est en cours de discussion devant le Sénat. Ce sujet fait aussi l'objet de réflexions menées par la Chancellerie.

 

A ce stade, il serait vain de vouloir faire un bilan de l'application des textes relatifs à l'action de groupe dans le domaine de la consommation. Force est de constater que la crainte d'une banalisation de ces actions n'est pas à ce jour avérée. Toutefois, nul doute que d'autres actions suivront. Il sera à ce titre intéressant de voir, en France et dans le monde, comment les consommateurs vont réagir à la récente affaire des tests diesel truqués.  

 

Patricia Foucher

chef du service des études juridiques, économiques et de la documentation

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