Une administration de conseil et de service est le premier objectif auquel doit parvenir l'action publique. Le second est de tendre vers une action publique modernisée, simplifiée, décentralisée et plus efficace.
La loi pour un Etat au service d'une société de confiance du 10 août 20180 adopte une stratégie nationale d'orientation de l'action publique. Elle doit tendre à une société de confiance d'ici à 2022.
L'Institut national de la consommation vous présente quelques mesures issues de cette loi.
1. Les relations entre l'administration et les administrés
1.1. Le droit à régularisation en cas d'erreur
1.2. La régularisation des dossiers incomplets par l'administré
1.3. Le recours à la transaction entre une administration de l'Etat et un administré
1.4. La possibilité pour un administré de demander un contrôle
2. La valeur des instructions et des circulaires
3. La saisine du tribunal administratif pour apprécier la légalité externe d'une décision
4. Quelques mesures spécifiques
4.1. La demande de cartes officielles et la dispense de justificatifs de domicile
4.3. La transparence des données foncières
Article 2 de la loi / articles L. 123-1 et L. 123-2 du code des relations entre le public et l'administration |
Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne pourra faire l'objet, de la part de l'administration, d'une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d'une prestation due.
Pour en bénéficier, elle devra :
La sanction pourra toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude. Est de mauvaise foi, toute personne ayant délibérément méconnu une règle applicable à sa situation. En cas de contestation, la preuve de la mauvaise foi et de la fraude incombe à l'administration.
Ces dispositions ne sont pas applicables :
1° - Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l'Union européenne.
2° - Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement.
3° - Aux sanctions prévues par un contrat.
4° - Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l'égard des professionnels soumis à leur contrôle.
Article 4 de la loi / article L. 114-5-1 du code des relations entre le public et l'administration |
Désormais, l'absence d'une pièce au sein d'un dossier déposé par un usager en vue de l'attribution d'un droit ne peut conduire l'administration à suspendre l'instruction de ce dossier dans l'attente de la transmission de la pièce manquante.
Si la pièce fait toujours défaut au moment de la décision d'attribution du droit concerné, cette attribution n'est effective qu'après la réception par l'administration de cette pièce.
Cette disposition ne s'applique pas dans le cas où la pièce manquante est indispensable à l'administration pour instruire valablement le dossier.
Article 24 de la loi / article L. 423-2 du code des relations entre le public et l'administration |
Ainsi que le prévoit l'article 2044 du code civil et sous réserve qu'elle porte sur un objet licite et contienne des concessions réciproques et équilibrées, il peut être recouru à une transaction pour terminer une contestation née ou prévenir une contestation à naître avec l'administration. La transaction est formalisée par un contrat écrit.
La loi pour un Etat au service d'une société de confiance du 10 août 2018 vient encadrer ce dispositif en créant un comité. Ainsi, lorsqu'une administration de l'Etat souhaite transiger, le principe du recours à la transaction et le montant de celle-ci peuvent être préalablement soumis à l'avis d'un comité.
L'avis du comité est obligatoire lorsque le montant en cause dépasse un seuil.
A l'exception de sa responsabilité pénale, la responsabilité personnelle du signataire de la transaction ne peut être mise en cause à raison du principe du recours à la transaction et de ses montants, lorsque celle-ci a suivi l'avis du comité.
Un décret doit être publié pour fixer la composition du comité et le seuil à partir duquel l'avis de ce comité est obligatoire.
Article 2 de la loi / articles L. 124-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration |
Le droit au contrôle
Sous réserve des obligations qui résultent d'une convention internationale et sans préjudice des obligations qui lui incombent, toute personne peut demander à faire l'objet d'un contrôle prévu par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur. La demande précise les points sur lesquels le contrôle est sollicité.
L'administration procède à ce contrôle dans un délai raisonnable, sauf en cas de :
L'opposabilité du contrôle
Sous réserve des droits des tiers, toute personne contrôlée peut opposer les conclusions expresses d'un contrôle à l'administration dont elles émanent.
Ces conclusions expresses cessent d'être opposables :
Lorsque l'administration constate, à l'issue de son contrôle, une méconnaissance des règles applicables à la situation de la personne contrôlée, celle-ci peut régulariser sa situation dans les conditions prévues pour le droit à l'erreur.
Article 20 de la loi / articles L. 312-2 et suivants du code des relations entre le public et l'administration |
La loi "confiance" vient apporter des précisions importantes sur la valeur et l'impact des instructions et circulaires.
L'abrogation des instructions et des circulaires
Les instructions et circulaires sont désormais réputées abrogées si elles n'ont pas été publiées, dans des conditions et selon des modalités fixées par décret.
La valeur juridique des instructions et des circulaires
Tout d'abord, toute personne peut se prévaloir des instructions et circulaires, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiées sur des sites internet désignés par décret.
D'autre part, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée.
Ces dispositions ne peuvent pas faire obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement.
Article 54 de la loi |
A titre expérimental, le bénéficiaire ou l'auteur d'une décision administrative non réglementaire pourra saisir le tribunal administratif d'une demande tendant à apprécier la légalité externe de cette décision.
Les moyens de légalité externes sont l'incompétence, les vices de forme et de procédure.
Pour quelles décisions ?
Cette mesure sera applicable aux décisions, précisées par décret en Conseil d'Etat, prises sur le fondement du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, du code de l'urbanisme ou du code de la santé publique et dont l'éventuelle illégalité pourrait être invoquée, alors même que ces décisions seraient devenues définitives, à l'appui de conclusions dirigées contre un acte ultérieur.
Ce dispositif n'est pas applicable aux décisions prises par décret.
Quelle sera la procédure applicable ?
La demande en appréciation de régularité sera formée dans un délai de trois mois à compter de la notification ou de la publication de la décision en cause. Elle sera rendue publique dans des conditions permettant à toute personne ayant intérêt à agir contre cette décision d'intervenir à la procédure.
Quelle sera la forme à respecter ?
La demande sera présentée, instruite et jugée dans les formes prévues par le code de justice administrative et sous réserve des adaptations réglementaires nécessaires.
Quelles seront les conséquences sur les recours déjà engagés ?
Elle suspendra l'examen des recours dirigés contre la décision en cause et dans lesquels sont soulevés des moyens de légalité externe, à l'exclusion des référés administratifs.
Quels seront les délais pour statuer ?
Le tribunal statuera dans un délai fixé par voie réglementaire. Il se prononce sur tous les moyens de légalité externe qui lui sont soumis ainsi que sur tout motif d'illégalité externe qu'il estime devoir relever d'office, y compris s'il n'est pas d'ordre public.
La décision sera-t-elle susceptible d'un appel ?
Non. La décision du tribunal ne sera pas susceptible d'appel mais peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation.
Quelles seront les conséquences de la prise de décision ?
Si le tribunal constate la légalité externe de la décision en cause, aucun moyen tiré de cette cause juridique ne pourra plus être invoqué par voie d'action ou par voie d'exception à l'encontre de cette décision.
Par dérogations aux règles relatives au retrait d'une décision administrative fixées par l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, l'autorité administrative pourra retirer ou abroger la décision en cause, si elle estime qu'elle est illégale, à tout moment de la procédure et jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois après que la décision du juge lui a été notifiée.
En principe, l'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision.
Où et combien de temps sera menée l'expérimentation ?
L'expérimentation sera menée, pour une durée de trois ans à compter de la publication d'un décret en Conseil d'Etat, dans le ressort des tribunaux administratifs, au nombre maximal de quatre, désignés. Elle fera ensuite l'objet d'une évaluation.
Une expérimentation est menée dans les départements de l'Aube, du Nord, des Yvelines et du Val-d'Oise pour une durée de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi. Elle fera l'objet d'une évaluation dont les résultats sont transmis au Parlement.
Dans ces départements, le demandeur d'une carte nationale d'identité, d'un passeport, d'un permis de conduire ou d'un certificat d'immatriculation est, à sa demande et lorsqu'il utilise un téléservice, dispensé de la production de pièces justificatives relatives à son domicile.
Pour bénéficier de cette dispense, le demandeur déclare son domicile et produit à l'administration en charge de l'instruction de sa demande une information permettant son identification auprès d'un fournisseur d'un bien ou d'un service attaché à son domicile (par exemple, une facture téléphonique). Le fournisseur est tenu de répondre aux sollicitations de l'administration en lui communiquant les données à caractère personnel lui permettant de vérifier le domicile déclaré par le demandeur.
L'administration assure la confidentialité et la protection de ces informations.
Article 49 de la loi |
La loi autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances, toute mesure relevant du domaine de la loi, visant à faciliter la réalisation de projets de construction. Ces ordonnances visent à assurer que l'atteinte des résultats est évaluée dans un cadre impartial et en conformité avec les dispositions du code des assurances. Elles permettent un accès au marché pour des solutions en matière de construction innovantes, en prévoyant des modalités d'évaluation de l'atteinte des résultats équivalents adaptées à la nature de la dérogation.
Les ordonnances qui pourront être prises sont les suivantes :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi :
Dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi :
Article 13 de la loi / article L. 112 A du livre des procédures fiscales
Afin de concourir à la transparence des marchés fonciers et immobiliers, l'administration fiscale rendra désormais librement accessibles au public, sous forme électronique, les éléments d'information qu'elle détient au sujet des valeurs foncières déclarées à l'occasion des mutations intervenues au cours des cinq dernières années.
Un décret en Conseil d'Etat doit préciser les modalités d'application de cette disposition.
Virginie Potiron,
Juriste à l'Institut national de la consommation (INC)