Une compagnie aérienne est responsable à l'égard des passagers et de leurs employeurs


Le service des enquêtes spéciales de la République de Lituanie a acheté, par l’intermédiaire d’une agence de voyages, des billets d’avion destinés à permettre à deux de ses agents d’effectuer un trajet entre Vilnius (Lituanie) et Bakou (Azerbaïdjan), via Riga (Lettonie) et Moscou (Russie), aux fins d’une mission professionnelle.

 

Cependant, le retard de plus de quatorze heures avec lequel les intéressés sont arrivés à leur destination finale a entraîné la prolongation de leur mission professionnelle. Le service des enquêtes leur a alors payé des indemnités journalières et des cotisations sociales supplémentaires pour un montant total de 1 168,35 litas lituaniens (LTL) (environ 338 euros). Ce service a donc demandé à Air Baltic d'être indemnisé à hauteur de ce montant. La compagnie aérienne a refusé de donner une suite favorable à cette demande.

 

L’indemnisation de l’employeur des personnes affectées par le retard d’un vol entre-t-elle donc dans le champ d'application de la Convention de Montréal ? C'est à cette question préjudicielle qu'a dû répondre la Cour de justice de l'union européenne (CJUE). 


1 - Le transporteur aérien est tenu d’indemniser tout dommage résultant d’un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandise

Pour rappel, le préambule de la convention de Montréal expose notamment que les États parties à cette convention " reconnaissent l’importance d’assurer la protection des intérêts des consommateurs dans le transport aérien international et la nécessité d’une indemnisation équitable fondée sur le principe de réparation ". 

 

Ainsi, les dispositions de l'article 19 de la convention de Montréal sont claires : " Le transporteur est responsable du dommage résultant d'un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandises (...) ". Il résulte de cet article que le transporteur aérien est, en principe, tenu à une obligation générale d’indemniser tout dommage résultant d’un retard. 

 

En revanche, il ne précise pas la personne à laquelle un tel dommage peut avoir été causé. La convention de Montréal, et notamment ses articles 19, 22 et 29, doit-elle être interprétée en ce sens qu’un transporteur aérien est responsable à l’égard de l'employeur du dommage résultant du retard de vols effectués par ses employés en application de ce contrat et tenant aux frais supplémentaires exposés par ledit employeur ?

 

2 - La convention s’applique non seulement aux dommages causés aux passagers, mais également à ceux subis par les employeurs des passagers

La Cour relève que la convention vise à protéger les intérêts des « consommateurs » dans le transport aérien international, cette notion comprenant non seulement les passagers, mais également les personnes qui ne sont pas elles-mêmes transportées. En ce sens, la CJUE conclut que la convention tend à s’appliquer non seulement aux dommages causé aux passagers, mais également à ceux subis par les employeurs des passagers. 

 

Elle en conclut donc que : 

 

"La convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international, conclue à Montréal le 28 mai 1999 et approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2001/539/CE du Conseil, du 5 avril 2001, et notamment ses articles 19, 22 et 29, doit être interprétée en ce sens qu’un transporteur aérien qui a conclu un contrat de transport international avec un employeur de personnes transportées en tant que passagers, tel que celui en cause au principal, est responsable, à l’égard de cet employeur, du dommage résultant du retard de vols effectués par les employés de celui-ci en application de ce contrat et tenant aux frais supplémentaires exposés par ledit employeur ".

 

 

Pour en savoir plus :

> CJUE, 3ème chambre, 17 février 2016 (affaire C‑429/14 - ECLI:EU:C:2016:88), Air Baltic Corporation AS c/ Lietuvos Respublikos specialiųjų tyrimų tarnyba

> Décret n° 2004-578 du 17 juin 2004 portant publication de la convention pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international, faite à Montréal le 28 mai 1999

 

 

 

Laurine CARACCHIOLI

juriste à l'Institut national de la consommation

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