Commande sur internet d'une voiture avec options : rétractation possible

JURISPRUDENCE (*)


Le droit de rétractation permet à un consommateur de changer d'avis à la suite d'un achat effectué, soit sur Internet ("contrat à distance"), soit à la suite d'un démarchage à domicile ("contrat hors établissement").

 

Néanmoins, son exercice peut être source de litige entre consommateurs et professionnels. Parmi les causes récurrentes, on y trouve les exceptions. En effet, le législateur a prévu des exceptions à l'exercice du droit, c'est-à-dire des situations dans lesquelles il ne sera pas possible de se rétracter bien que le contrat conclu puisse être qualifié de contrat à distance ou de contrat hors établissement.

Le "bien nettement personnalisé" constitue l'une d'entre elles. Retour sur cette notion !


Faits

Monsieur Y a commandé une voiture de couleur gris métallisé, dotée d'une alerte de distance de sécurité, auprès de la société X. Il a par ailleurs coché la case « je donne mon accord et vous demande expressément de commencer à exécuter les prestations de services faisant l'objet du contrat conclu [...], avant l'expiration du délai de rétractation. Je suis informé que mon droit de rétractation concernant les prestations de service disparaîtra une fois celles-ci exécutées. Cette demande ne met pas en cause mon droit de rétractation de 14 jours courant à partir de la livraison du véhicule » et versé un acompte de 3 238 €.

Quatre jours plus tard, par lettre recommandé, Monsieur Y demande l’annulation de sa commande et le remboursement de son acompte. La société X estime que Monsieur Y ne pouvait pas se rétracter car le contrat souscrit faisait l’objet d’une commande spécifique et s’analysait comme un contrat de prestation de services mais aussi parce que Monsieur Y avait renoncé à son droit de rétractation.

 

Solutions

  • S’agissait-il d’une commande spécifique ?

    A cette question, la Cour de cassation a répondu par la négative.
     

    En effet, les options relatives à la couleur de la carrosserie et à l’installation d’une alerte de distance de sécurité n’ont fait l’objet d’aucun travail spécifique de la part du vendeur et donc ne suffisent pas à faire du véhicule un bien nettement personnalisé qui aurait permis d’écarter le droit de rétractation. Ces options constituent l’une des caractéristiques du bien vendu et sont suffisamment communes pour que la voiture puisse être revendue à un autre acheteur. Il en aurait sans doute été différemment si l'acheteur avait commandé des options plus nombreuses et plus originales.

    Monsieur Y pouvait donc tout à fait se rétracter.

  • S’agissait-il d’un contrat de prestation de services ?

    Les juges ne sont pas liés par la qualification du contrat telle que donnée par les parties (article 12 du code de procédure civile). Même si la clause (case cochée) faisait référence à la souscription d'un contrat de prestation de services, le contrat souscrit par Monsieur Y devait être qualifié de contrat de vente de bien.
     

    Ainsi, l'article L. 221-25 du code de la consommation n'est pas applicable. Cet article prévoit que "le consommateur qui a exercé son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services […] dont l'exécution a commencé, à sa demande expresse, avant la fin du délai de rétractation verse au professionnel un montant correspondant au service fourni jusqu'à la communication de sa décision de se rétracter ; ce montant est proportionné au prix total de la prestation convenu dans le contrat".
    Enfin, Il doit être rappelé que le consommateur ne peut pas renoncer à son droit de rétractation car il est d'ordre public (article L. 221-29 du code de la consommation).

 

(*) Références : Cass. 1ère civ. 17/01/2018, n°17-10.255

 

Camille Minaud,
Juriste à l'Institut national de la consommation (INC)

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