Les charges locatives ou charges récupérables

Fiche pratique J 193


En contrepartie de la location d’un logement, le locataire doit engager plusieurs dépenses, outre le paiement du loyer, telles que les charges récupérables, les réparations locatives, les factures d’eau ou d’électricité, diverses taxes, etc.

 

Les charges locatives récupérables sont la contribution du locataire aux dépenses engagées par le propriétaire pour le fonctionnement de l’immeuble. Elles sont limitées à certaines dépenses prévues par l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989 et fixées par décrets (voir ci-dessous).

 

Face aux nombreuses interrogations soulevées par le sujet des charges locatives, l’Institut national de la consommation vous apporte les réponses aux questions que vous vous posez.

 

1 - Le principe des charges récupérables

2 - Les charges qui incombent aux locataires

3 - Les charges qui incombent aux propriétaires

4 - Le paiement des charges

5 - Le contrôle des charges

6 - Le droit de contester

7 - Les textes

 

1 - Le principe des charges récupérables

La règle est la même pour tous

Tous les logements obéissent aux mêmes règles, quel que soit leur régime juridique : logements de droit commun, HLM, logements soumis à la loi de 1948, conventionnés, à loyer plafonné.

 

Et pourtant ces règles n'ont pas la même origine, puisque les charges en HLM sont régies par l'article L. 442-3 du code de la construction, celles des autres logements par l'article 23 de la loi du 6 juillet 1989.

 

Mais ces deux articles sont rédigés en termes identiques : "Les charges récupérables, sommes accessoires au loyer principal, sont exigibles sur justification en contrepartie :

1° - Des services rendus liés à l'usage des différents éléments de la chose louée ;

2° - Des dépenses d'entretien courant et des menues réparations sur les éléments d'usage commun de la chose louée. Sont notamment récupérables à ce titre les dépenses engagées par le bailleur dans le cadre d'un contrat d'entretien relatif aux ascenseurs et répondant aux conditions de l'article L. 125-2-2 du code de la construction et de l'habitation, qui concernent les opérations et les vérifications périodiques minimales et la réparation et le remplacement de petites pièces présentant des signes d'usure excessive ainsi que les interventions pour dégager les personnes bloquées en cabine et le dépannage et la remise en fonctionnement normal des appareils ;

3° - Des impositions qui correspondent à des services dont le locataire profite directement.

La liste de ces charges est fixée par décret en Conseil d'Etat. […]".

 

De même qu'il existe deux textes législatifs, il existe deux décrets, l'un du 9 novembre 1982 pour les HLM, l'autre du 26 août 1987 pour les autres logements. Mais ces deux décrets sont rigoureusement identiques, et la liste des charges figure dans l'un comme dans l'autre.

 

La liste des charges est limitatives

La liste fixée par décret est une liste limitative des charges récupérables sur le locataire. Cela signifie que le propriétaire pourra demander le remboursement de toutes les dépenses qui y figurent, mais uniquement de celles-là : toutes celles qui n'y figurent pas incombent au propriétaire (Civ. 3ème, 27 novembre 2002 n°01-11130 et Civ. 3ème, 1er juin 2005, n°04-12137).

 

 Une charge non récupérable peut le devenir si elle vise à améliorer la sécurité ou la prise en compte du développement durable. Mais il faut pour cela que le bailleur et le locataire le désirent et concluent un accord collectif (« il peut y être dérogé par accords collectifs locaux portant sur l'amélioration de la sécurité ou la prise en compte du développement durable, conclus conformément à l'article 42 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 précitée »).

 

La répartition des charges

La loi n'impose aucun système de répartition entre les occupants, et tous sont présumés équitables. Cette répartition peut se faire au prorata de la surface réelle ou corrigée des logements, des loyers, ou encore en fonction du nombre de pièces. Dans les immeubles en copropriété, la base de répartition sera celle des millièmes, qui est certainement la plus juste puisqu'elle prend en compte l'utilité que représentent les équipements et services communs pour le lot. Cette base peut également être adoptée dans les autres immeubles.

 

Consultez la fiche pratique de l’INC "Copropriété : mesure des consommations énergétiques et individualisations des frais".

 

Le mode de répartition peut être identique pour tous les postes de dépenses ou au contraire varier. Par exemple, l'entretien des parties communes peut être réparti au prorata de la surface des logements, l'eau froide en fonction du nombre d'occupants, le chauffage suivant le volume chauffé, l'ascenseur selon l'étage, etc.

 

Mais le décompte des charges devra toujours faire apparaître le ou les systèmes pratiqués (article 23 alinéa 6, de la loi de 1989). Dans les immeubles en copropriété, le locataire doit recevoir, dès la conclusion du bail, les extraits du règlement de copropriété précisant la quote-part afférente à son lot pour chacune des catégories de charges (article 3 de la loi de 1989).

 

2 - Les charges qui incombent aux locataires

Les antennes collectives / L'ascenseur / Le chauffage et eau chaude collectifs / L'eau froide / Les travaux d'économie d'énergie / Les dépenses de personnel / L'entretien des parties communes / Les taxes

 

Les antennes collectives

Les frais d'entretien de l'antenne collective (dans les immeubles en copropriété) ne figurent pas dans la liste du décret. Ils ne sont donc pas récupérables.

 

La loi du 6 juillet 1966 relative à l'installation des antennes collectives (modifiée en 1990 pour tenir compte de l'arrivée du câble) prévoit que lorsqu’une antenne a été installée dans un immeuble collectif et qu’elle bénéficie à plusieurs logements, c’est au propriétaire de l’immeuble ou au syndicat des copropriétaires de financer les frais de pose, de remplacement et d’entretien de cette antenne.  

 

Toutefois, le coût n’est récupérable que sur les locataires qui ont accepté le raccordement à cette antenne (article 2 de la loi de 1966 et article 3 du décret n°67-1171 du 22 décembre 1967). La quote-part des dépenses est égale au quotient du total des frais exposés par le nombre total des branchements de l'installation.

 

 

L'ascenseur

Les charges d'ascenseur se composent de la consommation électrique, lorsqu'elle peut être isolée, et du coût des opérations de maintenance et d’entretien. Elles correspondent au contrat d'entretien minimal. Il s'agit principalement des vérifications périodiques, des réparations et remplacement de petites pièces usagées. Les locataires remboursent également le coût des interventions pour dégager les personnes bloquées en cabine, le dépannage et la remise en fonctionnement normal des appareils.

 

  Les locataires qui habitent au rez-de-chaussée de l’immeuble ne peuvent se voir imputer des charges d’ascenseur, sauf si ce dernier permet l’accès à des parties communes ou privatives telles que le sous-sol, le local poubelles, le parking ou les caves.

 

 

Le chauffage et eau chaude collectifs

 

Le chauffage collectif

 

Les contrats d'entretien : dans les petits immeubles, c'est souvent le gardien qui est chargé de la conduite du chauffage. Un contrat d'entretien est alors passé avec un spécialiste, en général le service après-vente de la marque de la chaudière, pour contrôler périodiquement et entretenir l'installation. Si ce contrat obéit à la norme NF, son contenu est limité aux prestations prévues au décret, il est donc récupérable sur les locataires. Les interventions hors contrat font l'objet d'une facturation détaillée permettant de distinguer les prestations récupérables des autres.

 

Dans les grands ensembles, c'est la gestion totale de l'installation qui est confiée à une société spécialisée, par contrat d'exploitation. Les obligations de la société sont beaucoup plus larges, puisqu'elles peuvent inclure les grosses réparations, voire le renouvellement de l'installation. Le contrat distingue alors trois groupes de prestations, appelés P1, P2 et P3, qui constituent la base. Le poste P1 correspond à la fourniture et la gestion de l’énergie ; P2 à la conduite et au petit entretien ; P3 au gros entretien et au renouvellement des matériels, pièces et main d’œuvre. Lorsque l'exploitant a financé les installations, le coût du contrat inclut de plus un poste P4 correspondant à l'amortissement des installations. Les locataires ne remboursent que les postes P1 et P2.

 

  Consultez le guide de l’ADEME « Contrats d’exploitation de chauffage en copropriétés » (2014).

 

Le chauffage urbain : lorsque l'immeuble est raccordé à un réseau de chauffage urbain, le bailleur souscrit un contrat de vente d'énergie calorifique. Celle-ci comprend :

 

  • une part variable (R1) qui couvre l’achat du combustible,
  • une part fixe (R2) qui correspond à l’abonnement.

La facture de chauffage urbain est intégralement récupérable sur les locataires.

 

L'eau chaude collective
Elle figure souvent dans les décomptes sous les initiales ECS (eau chaude sanitaire).

 

Le coût à répartir entre les occupants est la somme du coût de l'eau froide et de son réchauffement. Le coût de ce réchauffement (combustible + entretien de la chaudière) ne peut être connu avec certitude que lorsqu'il est assuré par une chaudière spécifique. Il sera évalué de façon empirique lorsqu'une même chaudière assure à la fois le chauffage des logements et la production d'eau chaude : par exemple en comparant les consommations de combustible entre les périodes chauffées et non chauffées. Il faudra alors veiller à ce que ce coût du réchauffement de l'eau a bien été déduit de la facture de chauffage, c'est-à-dire qu'il n'est pas facturé deux fois.

 

LA REPARTITION DES CHARGES ENTRE OCCUPANTS :

> Consultez la fiche pratique de l’INC "Copropriété : mesure des consommations énergétiques et individualisations des frais".

 

Extrait :

"Le principe : une installation permettant d'individualiser les frais de chauffage et d'eau chaude dans tous les immeubles collectifs d'habitation ou mixtes".

 

Quelle est la fonction de l'installation ?

Tout immeuble collectif d'habitation ou mixte pourvu d'une installation centrale de chauffage doit comporter, quand la technique le permet, une installation permettant :

 

  • de déterminer,
  • et de réguler la quantité de chaleur et d'eau chaude fournie à chaque local occupé à titre privatif.

 La loi Elan a renforcé le rôle de l'installation. Elle doit non seulement déterminer la quantité de chaleur et d'eau chaude fournie à chaque local, mais également la réguler.

 

Une installation dans quels immeubles ?

Ce dispositif doit être installé dans un "immeuble collectif pourvu d'une installation centrale de chauffage ou alimenté par un réseau de chaleur". Il s'agit d'un immeuble comprenant au moins deux locaux destinés à être occupés à titre privatif et chauffés par une même installation.

 

Le décret précise donc la définition d'un "local occupé à titre privatif". Ce dernier est constitué par la pièce ou l'ensemble des pièces réservées à la jouissance exclusive de personnes physiques ou morales.

 

 Le propriétaire de l'immeuble ou, en cas de copropriété, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic s'assure que l'immeuble comporte une installation répondant à cette obligation".

 

Lorsque les appartements sont équipés de compteurs d'eau chaude, les frais de combustible sont répartis entre les occupants en fonction des consommations enregistrées. Les autres frais (entretien de la chaudière, menues réparations) sont répartis selon les modalités adoptées dans l'immeuble.

 

 

L'eau froide

Est récupérable l'eau consommée par les occupants ou utilisée pour l'entretien des parties communes, mais non pour le ravalement de l'immeuble.

 

L'entretien des robinets des logements incombe aux locataires. Toutefois, le propriétaire peut légalement s'en charger en concluant un contrat d'entretien de robinetterie. Le coût de ce contrat incombe aux locataires s'il se limite aux opérations énumérées dans le décret (remplacement des joints, clapets et presse-étoupes des robinets) et qu'il n'inclut pas, par exemple, le remplacement des robinets usagés. L’avantage de ce type de contrats est de permettre un entretien régulier des équipements d’eau du logement et ainsi éviter, notamment, les dégâts des eaux.

 

La loi permet que chaque locataire d'un immeuble collectif soit titulaire d'un contrat avec le service des eaux, si le bailleur en fait la demande, mais il n'en a pas l'obligation.

 

Consultez la fiche de l'INC "Les factures d'eau".

 

LA REPARTITION DES CHARGES ENTRE OCCUPANTS

L'idéal serait que les logements soient équipés de compteurs individuels et que chacun paie en fonction de sa consommation, mais cela n'a rien d'obligatoire. Lorsque c'est le cas, l'on déduit la somme des consommations individuelles de la consommation générale. La différence, qui correspond à l'entretien des parties communes, est répartie selon les règles adoptées par le gestionnaire.

 

A défaut de compteurs individuels, la consommation de l'eau est répartie soit selon les règles adoptées pour les charges générales (surface, millièmes), soit en fonction du nombre d'occupants par logement. S'il existe dans l'immeuble un commerce gros consommateur d'eau, il faut s'assurer que celui-là, au moins, est équipé d'un compteur d'eau, sinon il faut le demander au gestionnaire. Si la loi ne l'impose pas, l'équité l'exige.

 

 

Les travaux d'économie d'énergie

C'est une charge locative qui a été créée en 2009 et qui a donné lieu à la création d’un article 23-1 dans la loi de 1989. Le bailleur qui fait réaliser des travaux d'économie d'énergie profitant directement à ses locataires peut leur demander une contribution financière, fixe, pendant 15 ans au maximum, mais à condition d'avoir au préalable engagé avec eux une concertation, sur :

 

  • les travaux envisagés,
  • leurs modalités,
  • les économies attendues,
  • le montant de la contribution.

La nature des travaux permettant cette contribution dépend de l'âge de l'immeuble. Dans les plus anciens, il s'agira d'un bouquet de travaux (au moins deux) choisis dans une liste réglementaire. Par exemple : isolation thermique de la toiture et remplacement de la chaudière.  

 

La contribution de 10 euros par mois dans les petits logements pourra atteindre 20 euros dans les plus grands.

 

Dans les logements les plus récents, les travaux devront atteindre une performance énergétique et la contribution sera calculée sur la base de l'économie d'énergie réalisée.

 

  Vous pouvez consulter la fiche de l’ANIL et la fiche de l'INC sur "L'éco-prêt à taux zéro et autres aides pour financer ses travaux de rénovation énergétique".

 

 

Les dépenses de personnel

Le décret de 1987, en son article 2, précise que les dépenses de personnel correspondent à la rémunération et aux charges sociales et fiscales. En ce qui concerne l'entretien des parties communes et l'élimination des rejets, il distingue selon que ces tâches sont assurées par le gardien ou par d'autres employés.

 

Le gardien ou le concierge

Sa rémunération se compose généralement d'un salaire en espèces et d'un salaire en nature (mise à disposition de la loge, électricité, chauffage). Cette rémunération sera récupérable en partie, ou pas du tout, selon les tâches qui lui sont confiées :

 

  • le gardien, ou le couple de gardiens, n'effectue que des tâches administratives (distribution du courrier, encaissement des loyers, contacts avec les fournisseurs) ou de surveillance : la totalité de sa rémunération reste à la charge du bailleur,
  • le gardien, ou le couple de gardiens assure, non seulement les tâches classiques d'administration de surveillance, mais aussi l'entretien des parties communes ainsi que l'élimination des rejets (sortie et nettoyage des poubelles) : les locataires remboursent au bailleur 75 % de sa rémunération en espèces, charges sociales et fiscales, et le cas échéant de celle de son remplaçant,
  • le gardien, ou le couple de gardiens, n'accomplit que l'une ou l'autre des deux tâches, sa rémunération ou celle de son remplaçant n'est récupérable qu'à 40 %.

Dans ces deux derniers cas, le bailleur garde à sa charge le salaire en nature du gardien, et tous les versements qui ne correspondent pas strictement à la rémunération et aux charges sociales : intéressement, indemnités et primes de départ à la retraite, indemnités de licenciement, cotisation à une mutuelle etc.

 

Les autres employés

Il peut s'agir d'un employé d'immeuble, salarié du propriétaire (le conjoint du gardien chargé uniquement de l'entretien entre dans cette catégorie), ou encore du personnel d'une société d'entretien. Dans tous ces cas, c'est la totalité de la rémunération, charges sociales comprises, qui est récupérable.

Mais le bailleur garde à sa charge les autres versements : intéressement, indemnités et primes de départ à la retraite, indemnités de licenciement, cotisation à une mutuelle.

 

 

L'entretien des parties communes

Il comprend à la fois l’entretien des parties communes intérieures et l’entretien des espaces extérieurs.

 

Il va s’agir, selon le décret de 1987, de :

 

  • l’électricité,
  • la fourniture des produits d’entretien (balais et sacs nécessaires à l’élimination des déchets) et des produits de désinsectisation et désinfection,
  • l’entretien de la minuterie, des tapis, des vide-ordures,
  • la réparation des appareils d’entretien de propreté tels que l’aspirateur,
  • les frais de personnels d’entretien,
  • l’entretien des voies de circulation, des aires de stationnement, des abords des espaces vers et des équipements de jeux pour enfants.

Ces charges n'incluent :

 

 

Les taxes

Le décret met deux taxes à la charge des locataires :

 

  • la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, qui apparaît sur l'avis d'imposition adressée à chaque propriétaire,
  • la taxe de balayage, qui est établie au nom de l'immeuble.

La Cour de cassation rappelle périodiquement que les frais annexes à la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (également appelés "frais de confection des rôles" ou "frais de gestion de la fiscalité locale") ne sont pas récupérables (voir notamment : Cass. civ. 3ème, 30 octobre 2002, pourvoi n° 01-10.617).

 

En outre, le bailleur n’est pas en droit de récupérer le montant des taxes sur les logements vacants qui ne profitent pas à son locataire mais résultent seulement de ses déclarations à la direction des services fiscaux sur l’occupation réelle d’une partie de sa propriété foncière (CA Paris, pôle 4, ch. 3, 11 oct. 2018, no RG : 16/07036).

 

3 - Les charges qui incombent aux propriétaires

Les dépenses qui ne figurent pas dans le décret restent définitivement à la charge du propriétaire. Il s'agit notamment des dépenses suivantes :

 

  • l'assurance de l'immeuble,
  • les honoraires du syndic, dans les immeubles en copropriété,
  • les frais de gestion : envois de quittance et de décompte de charges, frais de correspondance, etc.,
  • les achats ou le renouvellement des équipements : digicode, poubelle, aspirateur, boîte aux lettres, etc.,
  • les grosses réparations,
  • le ravalement de l'immeuble,
  • les dépenses consécutives à des actes de vandalisme, ou préventives (protection anti-graffitis),
  • les frais de surveillance et de sécurité de l'immeuble.

Cette liste n'est évidemment pas exhaustive.

 

La jurisprudence a permis également de déterminer quels travaux restaient à la charge du propriétaire sans possibilité de récupérer les charges sur le locataire :

 

 

4 - Le paiement des charges

Deux méthodes sont possibles, au choix du propriétaire :

 

  • ou bien les locataires remboursent la totalité des charges en fin d'exercice,
  • ou bien ils paient des acomptes mensuels provisionnels et le bailleur régularise les comptes une fois les dépenses connues avec exactitude. Cette seconde méthode est de loin la plus couramment pratiquée.

 

Qui paie les charges des logements vacants ?

 

Un logement vacant génère des charges comme les autres, et il est fréquent que celles-ci soient réparties entre les seuls logements occupés, ce qui accroît évidemment leur contribution. En fait, c'est le bailleur qui doit supporter les charges des logements vacants, en vertu du principe selon lequel la chose est aux risques du propriétaire (CA Paris 16e Ch. section B, 25 janvier 1990).

 

 

Le forfait de charge est interdit

La loi ne le dit pas aussi clairement, mais quand elle précise que les charges sont exigibles sur justification, elle proscrit la pratique du loyer charges comprises et du forfait de charges. Une conséquence de cette interdiction est que chacune des parties peut exiger à tout moment de revenir au système des charges réelles.

 

Le forfait de charges est en revanche expressément prévu pour les colocations (article 8-1, V, de la loi de 1989) et pour les baux meublés (article 25-10 de la loi de 1989). En tout état de cause "ce montant ne peut être manifestement disproportionné au regard des charges dont le locataire ou, le cas échéant, le précédent locataire se serait acquitté".

 

L’avantage du forfait de charge est une simplification de gestion pour le propriétaire qui n’est pas obligé d’effectuer un calcul de provisions sur charges avec régularisation annuelle des charges et réindexation.

 

L’inconvénient est que, si le montant des charges augmente fortement, le propriétaire ne pourra pas augmenter le forfait, il y aura donc pour lui un manque à gagner important.

 

 

Les provisions mensuelles ou acomptes

Ce sont des estimations des charges à venir, dont le montant est forcément approximatif, mais non arbitraire. La loi exige en effet que le propriétaire justifie ce montant en communiquant au locataire les résultats des comptes arrêtés lors de la dernière régularisation et le budget prévisionnel lorsque l'immeuble est en copropriété ou que le bailleur est une personne morale. Le montant de la provision ne doit donc pas varier entre deux régularisations.

 

 

La régularisation annuelle est obligatoire

Une fois par an, au moins, le bailleur doit faire les comptes des dépenses réellement engagées, et les répartir entre les occupants. Selon que le résultat sera supérieur ou inférieur au total des acomptes versés, il demandera un complément au locataire ou, au contraire, lui remboursera le trop-perçu. Il doit alors fournir au locataire un décompte détaillé des dépenses (voir la partie sur "Le contrôle des charges").

 

Pour tous les contrats en cours et les contrats conclus ou renouvelés à partir du 27 mars 2014, la régularisation est obligatoire une fois par an.

 

Lorsque la régularisation des charges n'a pas été effectuée avant le terme de l'année civile suivant l'année de leur exigibilité, le paiement peut être échelonné sur 12 mois si le locataire en fait la demande.

 

  Pour les charges de 2016, aucune régularisation n’est intervenue. Le 1er mars 2018, le bailleur adresse la régulation des charges pour 2016 au locataire. Ce dernier peut demander que cette régulation soit lissée sur 12 mois, soit du 1er mars 2018 jusqu’au 1er mars 2019.

 

 

Le rappel de charges

Le propriétaire qui n'a pas régularisé les comptes une fois par an, comme la loi le prévoit, peut remonter plusieurs années en arrière pour réclamer les charges dues par le locataire.

 

Depuis la loi Alur du 24 mars 2014, le délai de prescription a été réduit.

 

Ainsi, si l’arriéré était dû avant le 24 mars 2014 : il était possible de remonter 5 ans en arrière.

 

Si l’arriéré est dû à partir du 24 mars 2014 : il est possible de remonter 3 ans en arrière.

 

 Le délai de prescription reste de 3 ans pour les logements dits "48" et les logements sociaux de type HLM.

 

Cela dit, une telle pratique trahit une mauvaise gestion qui ne doit pas causer préjudice au locataire.

 

  Si, en tant que locataire, vous rencontrez des difficultés à vous acquitter d'un gros rappel, n'hésitez pas à demander des délais de paiement.

 

Un arrêt du 21 mars 2012 de la Cour de cassation a estimé que "la réclamation présentée sur une période écoulée de cinq ans de plus du triple de la somme provisionnée, si elle était juridiquement recevable et exacte dans son calcul était, dans ce cas, déloyale et brutale et constitutive d'une faute dans l'exécution du contrat".  Il en résulte donc un droit au profit du locataire au versement de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation d’exécuter le contrat de bonne foi (Cass. Civ 3ème 21 mars 2012, n° 11-14.174).  

 

Dans une autre affaire, le différentiel entre la provision mensuelle sur charges et la réalité des charges effectivement dues était tel que la propriétaire en ne prévenant pas ses locataires de cette différence à défaut d'une régularisation annuelle, avait commis une faute préjudiciable aux locataires qu'elle avait privés de la faculté de résilier le bail du fait de ce surcoût dont ils n'avaient pas connaissance. La Cour de cassation a confirmé le jugement de la juridiction de proximité qui condamnait la propriétaire au paiement de dommages-intérêts (Civ. 3ème, 8 octobre 2015, nº 14-21.710).

 

Dans un arrêt rendu par la 1ère chambre civile de la Cour d'appel de Reims le 9 février 2018 (RG N° 17/00714), la Cour a appliqué la jurisprudence constante en estimant que si la régularisation annuelle fait apparaître un écart important entre le montant provisionné et le montant réel des charges dues, le locataire peut engager la responsabilité du bailleur et obtenir des dommages et intérêts pour le préjudice qu'il subit du fait de la sous-estimation de la provision. En l'espèce, elle a considéré le bailleur comme responsable du préjudice résultant pour le locataire de la sous-estimation du montant des charges et a décidé d'indemniser la locataire du préjudice souffert à hauteur du montant des régularisations de charges dues.

 

5 - Le contrôle des charges

La loi donne deux outils au locataire pour vérifier le bien-fondé des charges qui lui sont demandées : le décompte détaillé, que le bailleur doit lui adresser un mois avant la régularisation, et le droit d'accès aux documents comptables du gestionnaire.

 

Lettre-type de l'INC : "Vous demandez des précisions sur le montant annuel des charges locatives".

 

Le décompte détaillé des charges

La loi prévoit que le décompte est établi « par nature de charges », sans autre précision. Pour respecter cette prescription, certains gestionnaires vont détailler sur plusieurs pages les dépenses engagées, tandis que d'autres limiteront le décompte à un chiffre par poste : entretien, chauffage, ascenseur, eau froide. Il ne semble pas qu'ils soient fautifs, mais ils s'exposent à devoir répondre à toute demande d'explication du locataire.

 

Dans les immeubles collectifs, le décompte doit également indiquer le (ou les) mode(s) de répartition entre les occupants.

 

Le bailleur doit adresser le décompte à chaque locataire ; il ne peut pas se contenter de l'afficher (TI Paris 20e arr., 6 novembre 1984, Pichon et autres c/ OPHLMVP).

 

Une notice d'information sur les modalités de calcul des charges de chauffage et de production d'eau chaude sanitaire collectif doit être transmise avec la notice d’information relative aux droits et obligations des locataires et des bailleurs  qui sont annexés au contrat de bail (article 3 de la loi de 1989 et arrêté du 29 mai 2015 relatif au contenu de la notice d’information annexée aux contrats de location de logement à usage de résidence principale).

 

Le bailleur transmet à la demande du locataire le récapitulatif des charges du logement par voie dématérialisée ou postale (au choix du locataire).

 

 

Les justificatifs sont à la disposition des locataires

Durant six mois à compter de l'envoi du décompte de charges, les pièces justificatives sont tenues à la disposition des locataires dans des "conditions normales", mais elles n'ont pas à lui être communiquées.

 

La loi en vigueur ne précise pas quelles sont ces pièces justificatives, mais une réponse ministérielle citait, à titre d'exemples, les factures, contrats de fourniture et d'exploitation en cours et leurs avenants (Rép. min. JOAN [Q], 30 novembre 1987, p. 6544).

 

La Cour d’appel d’Angers a pu décider qu’une simple attestation établie par un tiers, au nom duquel se trouve le compteur général d’eau et qui n’est pas le concessionnaire du service des eaux, est insuffisante à justifier les charges (CA Angers, ch. civ., sect. A, 10 déc. 2013, n° RG : 12/00834).

 

Le locataire qui entend procéder à cette vérification devra en exprimer le souhait auprès de son bailleur ou de son gestionnaire. Celui-ci pourra organiser une visite dans ses locaux pour consulter les pièces justificatives. En revanche, l’organisation d’une réunion générale ne suffit pas. Chaque locataire a le droit de consulter individuellement les justificatifs. En outre, les pièces doivent être tenues à la disposition personnelle du locataire pendant tout le délai légal et pas seulement à l’occasion d’une seule réunion (Cass. Civ. 3ème, 28 janvier 2004, n° 02-15.810).

 

Le locataire peut demander que les pièces lui soient envoyées par courrier. Cependant, il devra prendre en charge les frais divers liés à cet envoi (frais de photocopies, affranchissement du courrier, etc.).

 

Le locataire qui demande à consulter les justificatifs de charges et auquel le propriétaire ne répond pas est en droit de ne pas payer le solde qui lui est demandé, les charges n'étant pas justifiées. Cependant, il doit ménager les preuves de sa bonne foi en renouvelant sa demande de rendez-vous par lettre recommandée, sans attendre l'expiration du délai d'un mois suivant l’envoi du décompte des charges.

 

Passé ce délai de six mois, les charges sont considérées comme justifiées si le locataire n’a pas fait jouer son droit de contestation. Avec cette conséquence que s’il ne s'acquitte pas du solde qui lui est demandé, il encourt la résiliation du bail. S'il conteste cette demande, il devra saisir le tribunal, sans attendre de recevoir un commandement de payer ou dans le mois qui suit ce commandement.

 

Il pourra également saisir la Commission départementale de conciliation (voir la lettre type de l’INC).

 

Nos conseils pour un contrôle efficace

Contrôler les charges n'a rien d'une partie de plaisir, mais ce travail fastidieux peut s’avérer payant s'il révèle que des charges ont été imputées à tort au locataire, ou encore qu’il y a des anomalies de gestion.

 

Face à une forte hausse des charges, votre premier travail consistera à comparer le nouveau décompte à celui de l'année précédente pour repérer quels postes ont nettement « dérapé » par rapport à la hausse générale des prix. Une fois les anomalies localisées, prévoyez quels justificatifs demander lors de la visite de contrôle, sous peine de crouler sous les documents : factures de la société X, bulletins de paie, contrats d’entretien, etc. Si le décompte est suffisamment détaillé, ce sera relativement aisé ; mais s'il est succinct, ce sera plus délicat. Par exemple si un poste intitulé « entretien-hygiène » ne distingue pas les salaires des fournitures, l'entretien de propreté de la désinsectisation, etc., il faudra alors tout vérifier.

 

Si cela vous est possible, ne venez pas seul au rendez-vous. L'administration a d'ailleurs rappelé qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'interdisait aux locataires ou à leur organisation de se faire assister par une personne compétente lors de l'examen des pièces justificatives (Rép. min. JOAN [Q], 10 septembre1990, p. 4269).

 

Sur place, vous devez être particulièrement attentif aux dates des interventions, à leur fréquence, à l'intitulé des factures, aux consommations enregistrées, etc. Demandez à photocopier les documents qui vous semblent utiles, mais sachez qu'on pourra vous en facturer le prix et même vous refuser cette possibilité. N'hésitez pas non plus à demander des explications sur les points qui vous paraissent contestables.

 

Les droits des associations de locataires

  Ce point s'applique uniquement au secteur locatif social (HLM).

 

La loi donne aux associations de locataires déclarées des droits plus étendus qu'aux locataires isolés. En matière de contrôle tout d'abord, puisque c'est à tout moment qu'elles peuvent accéder aux documents relatifs aux charges, et non, comme les locataires, uniquement dans les six mois qui suivent l'envoi du décompte de régularisation ; mais aussi en matière de concertation, puisqu'elles peuvent demander à être consultées sur la gestion de l'immeuble chaque semestre et conclure avec le propriétaire des accords collectifs de location, en particulier pour la réalisation de travaux visant à réduire les charges (article 44 de la loi du 23 décembre 1986).

 

Pour être reconnue par le bailleur, une association de locataires doit représenter 10 % des locataires ou être affiliée à une association nationale siégeant à la commission nationale de concertation (CNL, CGL, La CSF, CLCV, Afoc).

 

6 - Le droit de contester

Le locataire peut refuser de payer lorsque :

 

  • les dépenses facturées ne figurent pas dans la liste des charges récupérables,
  • la demande de régularisation n'est pas accompagnée d'un décompte des dépenses,
  • le bailleur ne permet pas au locataire de consulter les justificatifs,
  • il n'existe pas de justificatif correspondant aux charges réclamées.

La Cour de cassation est venue préciser que le point de départ de la prescription de l’action en répétition des charges indûment perçues par le bailleur est celui de la date de la régularisation des charges, et non celle du paiement des provisions (Cass. Civ. 3ème, 9 novembre 2017, n°16-22445).

 

Peut-il également ?

 

 

...contester les charges payées sans réserve ?

Oui, le paiement sans réserve des charges et des régularisations de charges ne signifie pas que le locataire ait acquiescé aux décomptes qui lui ont été transmis. Il ne lui est donc pas interdit de contester ultérieurement le montant des charges s'il estime qu'il a trop versé (CA Paris 6e Ch. B, 12 octobre 1995).

 

 

...engager la responsabilité du bailleur pour mauvaise gestion ?

En principe, la gestion de l'immeuble relève de la responsabilité du propriétaire, et non des locataires, mais celle-ci ne doit pas causer préjudice aux locataires, comme dans l'affaire jugée par la cour de Versailles : le bailleur avait changé de contrat d'entretien de chauffage, ce qui avait entraîné une augmentation de plus de 50 % des charges de chauffage des locataires. Considérant qu'il avait commis une négligence, la Cour l'a condamné à réparer le préjudice subi par chaque locataire (CA Versailles, 13 novembre 1987).

 

Voir le développement sous le point "Rappel de charges" relatif à la responsabilité du bailleur pour mauvaise gestion.

 

 

...refuser de payer pour un équipement non utilisé ?

La question est fréquemment posée par les locataires qui choisissent de monter l'escalier à pied, plutôt que de prendre l'ascenseur, mais la réponse est négative : que le locataire utilise ou non les services collectifs, il doit participer aux charges correspondantes. Cela a été rappelé à un locataire qui refusait de payer le chauffage (CA Reims, 1er juillet 1993).

 

7 - Les textes

 

Les textes généraux

 

Liste des charges récupérables

Tous les logements, sauf HLM et loyers plafonnés HLM et loyers plafonnés

- Article 23 et 23-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

- Décret n° 87-713 du 26 août 1987

- Aticle L. 442-3 du code de la construction et de l'habitation

- Décret n° 82-955 du 9 novembre 1982.

 

Paiement des charges (tous logements) : article 23 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

 

 

Forfait de charges ("charges comprises") :

Article 8-1, V, de la loi de 1989 ;

Article 25-10 de la loi de 1989

 

 

Les textes spécifiques

 

Accords collectifs de location : article 42 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

 

Antennes de télévision et câble :

Loi n° 66-457 du 2 juillet 1966

Article 3 du décret n°67-1171 du 22 décembre 1967

 

Ascenseur :

Article 23, al. 3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989

contrats d'entretien :

Articles L. 125-2-2 et R. 125-2 du code de la construction et de l'habitation ;

Arrêté du 18 novembre 2004 relatif à l'entretien des installations d'ascenseurs.

 

Associations de locataires : articles 41 à 44 de la loi n° 86-1 290 du 23 décembre 1986.

 

Chauffage (compteurs de chaleur) :

- Articles L. 241-9 et R. 241-6 et suivants du code de l’énergie ;

- Loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;

- Décret n°2019-496 du 22 mai 2019 relatif à la "détermination individuelle de la quantité de chaleur, de froid et d'eau chaude sanitaire consommée et à la répartition des frais de chauffage, de refroidissement et d'eau chaude sanitaire, dans les immeubles collectifs à usage d'habitation ou à usage d'habitation et professionnel".

- Arrêté du 6 septembre 2019 relatif à la "détermination individuelle de la quantité de chaleur et de froid et à la répartition des frais de chauffage et de refroidissement, dans les immeubles collectifs à usage d'habitation ou à usage d'habitation et professionnel".

 

Eau froide (compteurs) :

Article 93 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains ;

Décret n° 2003-408 du 28 avril 2003 relatif à l'individualisation des contrats de fourniture d'eau.

 

Contribution pour travaux d'économie d'énergie

Parc privé Parc social
Article 23-1 de la loi du 6 juillet 1989

Article L. 442-3 du code de la construction et de l’habitat,

Décret n° 2009-1439 du 23 novembre 2009 tendant à améliorer les rapports locatifs relatif à la contribution du locataire au partage des économies de charges issues des travaux d'économie d'énergie réalisés par un bailleur privé Décret n° 2009-1438 du 23 novembre 2009 relatif à la contribution du locataire au partage des économies de charges issues des travaux d'économie d'énergie réalisés par un bailleur social
arrêté du 23 novembre 2009 relatif à la contribution du locataire au partage des économies de charges issues des travaux d'économie d'énergie réalisés par un bailleur privé Arrêté du 23 novembre 2009 relatif à la contribution du locataire au partage des économies de charges issues des travaux d'économie d'énergie réalisés par un bailleur social

 

Prescription du paiement : article 2224 du code civil.

 

Mise à jour par Fanny JOFFFROIS

Juriste à l'Institut national de la consommation

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