Nullité du contrat d'assurance habitation : le questionnaire, rien que le questionnaire mis à jour
Pour pouvoir annuler, en cas de fausse déclaration intentionnelle de risque, un contrat d'assurance multirisques habitation, la production, par l'assureur, du formulaire de déclaration initiale des risques, est une condition essentielle
La nécessité de produire le questionnaire pour annuler le contrat d'assurance : l'assurance habitation est concernée
La saga des conditions exigées de l’assureur afin de soulever la nullité du contrat d’assurance en cas de fausse déclaration intentionnelle continue.
La série d’arrêts rendus en la matière, à la suite de l’arrêt de principe de la chambre mixte du 7 février 2014, et qui ont posé le principe de la production du formulaire, traçant les questions posées par l’assureur et les réponses apportées par l’assuré, afin d’obtenir la nullité du contrat d’assurance en cas de fausse déclaration intentionnelle, concernaient l’assurance automobile.
Le 26 mars 2015, la deuxième chambre civile (Cass.civ.II, n° 14-15204), était, cette fois, amenée à se pencher sur la validité des mentions pré-imprimées en matière d’assurance habitation.
Les faits sont les suivants :
Un assuré a, lors de la souscription d’un contrat d’assurance habitation, apposé sa signature sur les conditions particulières d’un contrat contenant des mentions pré imprimées qui indiquaient que son bien bénéficiait d’un niveau de protection donné dont la définition était précisée par les conditions générales.
Deux vols avec effractions sont commis dans le bien assuré. L’assureur rechigne à délivrer sa garantie. L’assuré l’assigne.
L’assureur excipe la nullité du contrat. Il s’appuie sur lesdites mentions pré-imprimées qui ne correspondent pas au niveau effectif de protection du bien qui est, en réalité, moins bien protégé. Cette fausse déclaration a, selon son affirmation, diminuée dans son esprit l’objet du risque quand bien même elle n’aurait pas eu, au cas particulier, d’impact sur le sinistre.
La Cour d’appel d’Aix en Provence valide le procédé. Un pourvoi est formé.
Les mentions pré-imprimées des conditions particulières d’un contrat d’assurance habitation peuvent-elles servir d’unique fondement pour soulever une fausse déclaration intentionnelle ?
La deuxième chambre civile, en se prévalant du visa et du chapeau de l’arrêt de la chambre mixte du 7 février 2014, répond par la négative.
Elle précise, dans son conclusif, que les mentions pré-imprimées, insérées dans les conditions particulières, dont l’assuré n’est pas le rédacteur, et censées correspondre à de prétendues déclarations que l’assureur entend lui opposer, doivent être le reflet des réponses données par l’assuré à « des questions posées préalablement à la souscription du contrat ».
Ainsi, cette formation de la Cour de Cassation affirme-t-elle de manière certaine que seul le formulaire de questions-réponses qui retracent l’ensemble des éléments soumis à interrogation avant la conclusion du contrat permet à l’assureur de se prévaloir d’une fausse déclaration intentionnelle.
La deuxième chambre civile rejoint ainsi la position de la chambre criminelle avec laquelle elle était en conflit avant l’arrêt de la chambre mixte.
Dès lors, les compagnies d’assurances via la distribution de nouveaux contrats d’assurance habitation devront, pour pouvoir se conformer à cette jurisprudence, remettre, à l’occasion de chaque contrat souscrit, à l’assuré une copie du formulaire de déclaration des risques qui lui aura été soumis.
Qu’en est-il des contrats en cours, dénommés, dans la pratique, « contrats en stock » ?
Il serait logique que lors du renouvellement de ces derniers, les assureurs envoient un questionnaire de déclaration des risques s’ils souhaitent le moment venu, en présence d’un assuré de mauvaise foi, soulever la fausse déclaration intentionnelle.
Certains acteurs du marché ont souhaité développer la théorie selon laquelle certaines mentions-pré rédigées insérées dans les conditions particulières contiennent des éléments tellement personnalisés qu’il est impossible que les réponses aient pu être inventées ou correspondent à un profil type particulier dont les assureurs souhaitent uniquement faire « affaire avec ».
La deuxième chambre civile dans un arrêt en date du 5 février 2015 (n° 13-28538) a répondu à cette théorie. Elle l’a rejetté de manière ferme.
Un arrêt de cour d’appel qui, pour prononcer la nullité du contrat d’assurance, s’était appuyé, sur une mention d’une parfaite clarté présente dans les conditions particulières de telle sorte qu’elle ne pouvait échapper la vigilance de l’assuré lorsqu’il a signé ces dernières, a, en effet, été censuré pour violation des articles L. 113-2, 2°, L. 112-3, alinéa 4 et L. 113-8 du code des assurances.
Charles Le Corroller,
Juriste à l'INC